Aller au contenu
Séries Autres séries Black Mirror : De l’autre côté de l’écran (saison 1)

Black Mirror : De l’autre côté de l’écran (saison 1)

Black Mirror - Black Mirror : De l’autre côté de l’écran (saison 1)

Quand il ne pratique pas son travail de critique et n’anime pas des émissions, Charlie Brooker écrit des séries. Cette fois, il change un peu de forme, mais reste dans la satire, ajoutant au passage une touche de science-fiction.

Black Mirror est une anthologie dont la première saison se compose de trois épisodes qui se proposent de nous présenter des histoires tournant autour de notre dépendance de plus en plus importante aux technologies. Plus précisément, ce miroir noir est plus ou moins l’écran de la télévision, de l’ordinateur, du téléphone, et ce qu’il reflète n’est pas très glorieux, du moins, quand c’est Brooker qui s’y intéresse.

Avec les années, son ton sarcastique et son amour de la satire semblent laisser de plus en plus de place au cynisme. C’est en tout cas ce qui ressort tout particulièrement des deux épisodes qu’il écrit – il co-signe le second avec sa femme.

La première histoire est intitulée The National Anthem et pourrait bien se dérouler aujourd’hui, sauf qu’elle se concentre sur des dérives qui sont encore sous contrôle pour le moment. Que se passe-t-il quand le gouvernement perd tout pouvoir de décision et que les réseaux sociaux s’imposent comme un outil de pression ? Tout le monde, derrière un écran, juge et décide ce que le Premier Ministre doit faire dans une situation unique en son genre. C’est la dictature des médias qui devient une réalité sous nos yeux et la conclusion fait froid dans le dos, même si elle n’arrive pas comme une surprise. Il faut dire que Brooker utilise son intrigue pour faire un point et provoquer par la même occasion. D’ailleurs, s’il maitrise bien la montée en puissance de la tension dramatique, il ne fait pas d’effort pour enrober le message.

Cette approche directe manque tout particulièrement de finesse dans la seconde histoire, 15 Million Merits. Dans un univers dystopien où notre dépendance à l’écran noir est devenu un véritable moteur économique, un jeune homme trouve l’inspiration qui le sort de son état de zombie, mais la corruption de la morale orchestrée par la real-tv qui limite nos aspirations va le mettre face à une réalité qui le redéfinira, ou non. La conclusion laisse de la place à l’interprétation, mais il ne faut pas trop rêver, l’écran est toujours là, la prison est différente. En tout cas, cet épisode tire en longueur pour offrir une démonstration relativement lourde et froide. Le couple de scénaristes n’avait pas réellement grand-chose d’original à raconter et ne parvient pas à donner assez de cœur à leur histoire pour la rendre pertinente.

C’est un problème qu’on ne rencontrera pas dans The Entire History of You. Pour ce dernier épisode, c’est Jesse Armstrong qui signe le scénario et la tonalité est bien différente de ce qui a précédé. En nous entrainant dans un monde où les gens enregistrent perpétuellement ce qu’ils voient et passent leur temps à revenir sur des instants passés pour les interpréter, un homme devient obsédé par une image de sa femme avec un autre homme qui le poussera à décortiquer ce qui s’est passé dans une soirée entre amis, inspectant le moindre regard échangé. On plonge ici dans un drame émotionnel prenant qui montre comment la dépendance à la technologie va effacer les liens relationnels humains existants dans un couple. Passer à la loupe chaque moment de son existence pour y donner un sens est une arme à double tranchant, surtout quand on ne voit plus les autres qu’au travers d’un écran.

Dans son intégralité, cette première saison de Black Mirror délivre des récits aux propos pertinents. Le but est clairement de pousser le téléspectateur à réfléchir, mais il y a occasionnellement un manque de subtilité qui entame la force des arguments. L’ensemble se regarde en tout cas sans déplaisir, mais manque d’homogénéité.