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Bilans de Saisons Comme les Gallagher, Shameless est pris dans un cercle vicieux

Comme les Gallagher, Shameless est pris dans un cercle vicieux

shameless saison 6 emmy rossum - Comme les Gallagher, Shameless est pris dans un cercle vicieux

Frank : It warms my heart that at least one Gallagher has lived up to his genetic potential.

En six ans, les Gallagher ont subi toutes les galères possibles et imaginables. Ils ne sont pas portés par la chance et prennent rarement les décisions pouvant les mener à améliorer leur situation. La saison 6 de Shameless ne déroge pas à la règle et est même pire : ils sont conscients de leurs mauvais choix.

Debbie tombe enceinte de son premier petit-ami qui ne restera pas dans les parages pour l’élever. Elle a voulu cet enfant, manigancé pour et compte le garder, quitte à ne pas écouter Fiona quant à l’avenir peu brillant qui attend ce bébé. Les arguments de la grande sœur, s’il ne trouve pas oreille chez la petite, font écho à leur enfance à tous, dans un environnement pauvre en finance et en éducation approprié. Le pire concernant Debbie est qu’elle est pleinement consciente de ce que l’absence de parents stables fait sur un enfant, mais elle choisit de perpétrer le schéma familial en connaissance de cause.

La décision de Fiona, également enceinte, d’avorter, tend à vouloir briser un déterminisme social frappant tous les membres de la famille à un certain niveau. Ce fatalisme, elle tente de s’en échapper par sa relation avec Sean. Libérée d’un mariage express et ayant enfin une situation financière plus ou moins stable, elle envisage un avenir plus serein auprès de son nouveau petit-ami, allant même jusqu’à emménager et planifier son mariage avec l’ex-héroïnomane.

Elle qui a toujours été l’élément responsable de la famille réussit enfin à ne plus gâcher les chances que la vie lui donne, mais à les embrasser. Malheureusement, cela ne tournera pas forcément à son avantage comme le suggère le dernier épisode de la saison. Cette conclusion est d’ailleurs tellement attendue qu’elle enlève tout impact pour le personnage comme pour le spectateur – ce que l’expression blasée de Fiona en robe de mariée sur un banc à fumer une cigarette retranscrit parfaitement.

Shameless a toujours puisé sa tragédie dans l’inéluctabilité de répéter les mêmes erreurs, encore et encore. Lip, qu’un brillant avenir universitaire attendait, trouve le moyen de tout gâcher pour une pulsion amoureuse peu inspirée. Toute son intrigue tend à ne pas le montrer sous un bon jour, lui qui réussissait depuis plusieurs saisons à s’envoler du carcan familial. Rien n’est fait pour apporter une nuance à son comportement, sa descente aux enfers étant aussi directe que, disons-le, assez grossière.

Il faut alors se tourner vers Carl et Ian pour entrevoir désormais un quelconque futur. Le premier, après une incursion évidente dans le banditisme, se construit par lui-même, en choisissant une figure paternelle plus sympathique que celle qu’il avait. Sa storyline est intéressante, donnant enfin du poids au personnage, même si elle se déroule sans une once de surprise.

Désormais loin de Mickey, Ian réapprend à vivre malgré le gène Gallagher qui, littéralement, influence son comportement. Grâce à son petit-ami pompier, il parvient enfin à revenir à ses vieux rêves et à se battre pour, malgré sa bipolarité. Même si elle se révèle trop sporadique, sa partie est réellement prenante, portée brillamment par Cameron Monaghan.

Frank, le point d’origine de ce déterminisme social, tente pourtant de faire amende honorable cette année. Que ce soit par la grossesse de Debbie ou le mariage de Fiona, il essaie à sa drôle de manière d’être enfin un père « digne de ce nom », l’addition de Queenie, son ancienne maîtresse, n’y étant pas étrangère. Sans succès, évidemment. La prévisibilité des conclusions et la stupidité de l’intrigue de la secte n’aident alors pas à rendre ce chemin vers la rédemption pertinent et viable.

De manière générale, ce qui rend cette saison plutôt faible est que les Gallagher semblent enfermés dans leurs propres intrigues en cercle fermé, n’échangeant ensemble que pour donner l’image d’une famille ou autour d’enjeux ponctuels et agissant comme écrans de fumée comme la saisie de la maison. Beaucoup d’histoires – et notamment tout ce qui touche Kevin, Vee et Svetlana – apparaissent comme étant là pour boucher les trous en attendant les pics émotionnels de chaque intrigue et donc superflues. Cette sixième saison s’établit sur un manque de synergie de groupe rendant la redondance de leurs problèmes encore plus visibles.

Si Shameless parvient encore à faire rire et toucher, elle ne possède plus l’étincelle qui faisait d’elle un portrait déjanté d’une famille en proie avec ses propres gènes. En ne s’affranchissant pas de l’ombre de leurs parents, les Gallagher dépeignent un déterminisme social intéressant, mais dont le portrait devient trop didactique pour avoir l’impact qu’il avait auparavant. Bien sûr, tout n’est pas mauvais dans cette saison, loin de là, mais il faudra apporter un vent frais aux intrigues pour que la série ne s’enfonce pas dans une rengaine qui n’a plus rien à donner.

À ce jour, les cinq premières saisons de Shameless sont disponibles en DVD en France.