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Séries American Vandal : Faux Documentaire, véritable réussite

American Vandal : Faux Documentaire, véritable réussite

American Vandal Saison 1 - American Vandal : Faux Documentaire, véritable réussite
American Vandal Saison 1

Les séries Netflix semblent parfois être générées par un algorithme et ce n’est pas American Vandal qui prouvera le contraire, sur papier tout du moins. Cette création de Dan Perrault et Tony Yacenda est la rencontre de deux genres très populaires sur le service de streaming au moment de son lancement, soit en 2017 : le documentaire True Crime et le Teen Show.

Depuis que le film Le Dossier Adams (The Thin Blue Line) d’Errol Morris a révolutionné le documentaire True Crime, le genre n’a fait que se développer. Récemment, les succès de The Jinx (HBO) et Making a Murderer (Netflix) — ou encore le podcast Serial — ont ravivé l’intérêt du public pour ce type d’histoires qui apparaissent être de plus en plus formatées.

Pour s’en rendre compte, il suffit de passer quelques minutes devant American Vandal. Présenté comme étant le travail de deux lycéens, Peter Maldonado (Tyler Alvarez) et Sam Ecklund (Griffin Gluck), ce faux-doc nous entraine dans leur établissement scolaire, auprès de leurs camarades de classe, alors que l’on découvre que Dylan Maxwell (Jimmy Tatro) a été expulsé après avoir été accusé à tort — selon Dylan. Il serait responsable d’avoir vandalisé 27 voitures stationnées sur le parking des professeurs. Il aurait dessiné des pénis sur chaque véhicule et la facture pour le nettoyage est tellement élevée que cela devient un acte criminel.

Peter et Sam se prennent très au sérieux et c’est là le génie d’American Vandal. Inconsciemment, les deux adolescents ne font qu’imiter les gimmicks des journalistes qui les ont précédés. Quand on est familier avec le genre, une bonne partie de l’humour découle de la manière dont sont détournés les codes de la narration.

Néanmoins, la série s’appuie également sur une dose d’humour potache qui plonge l’ensemble dans une sorte de monde absurde. C’est là que la rencontre entre Teen Show et True Crime devient autant une force qu’un problème.

Clairement, l’idée était de séduire un public jeune avec ces histoires de lycéens, mais la forme adoptée par le récit est bien plus familière pour les spectateurs plus âgés qui ne seront pas forcément les plus sensibles à l’humour parfois graveleux qui est exploité ou à l’exploration des codes guidant les relations sociales chez les jeunes d’aujourd’hui.

C’est ce conflit générationnel qui explique surement pourquoi American Vandal n’aura pas de saison 3, car le public susceptible d’apprécier l’ensemble de ce que les scénaristes tentent de réaliser est finalement réduit.

Cela est regrettable, car c’est une série qui a des choses vraiment intéressantes à dire et qui ne manque certainement pas d’humour.

American Vandal Saison 2 - American Vandal : Faux Documentaire, véritable réussite
American Vandal Saison 2

La première saison d’American Vandal est avant tout là pour nous parler de la manière dont les jeunes sont limités par les préjugés qui en viennent à les définir en tant qu’individu dans cette jungle qu’est le lycée, et pour montrer comment les professeurs peuvent parfois échouer à voir le malaise chez leurs étudiants — et les pousser ainsi en dehors du système. Au-delà des longues discussions sur la manière dont les pénis ont été dessinés, cette saison 1 examine des relations complexes d’une manière qui fait de ce (faux) documentaire policier une véritable étude sociale.

Pour parfaire le tout, les scénaristes se permettent même de critiquer l’approche adoptée par ceux qui font justement ce type de documentaire. Comment manipuler le narratif pour servir leur histoire n’est jamais sans conséquence et comment la recherche de vérité peut également faire des victimes.

Dans sa saison 2, American Vandal prend tout cela, ajoute une touche méta et élève l’ensemble à un niveau encore supérieur — avec une grosse dose d’humour scatologique en plus.

Devenus célèbres avec leur premier documentaire qui a été acheté par Netflix, Peter et Sam sont désormais sollicités par beaucoup de monde, mais c’est le message de Chloe Lyman (Taylor Dearden) qui les convainc de s’intéresser aux attaques du Turd Buglar. Ce dernier est un vandale qui a attaqué un lycée privé catholique à l’aide d’un laxatif qui provoqua une panique générale et beaucoup d’humiliation.

Kevin McClain (Travis Tope) a été poussé à avouer pour tous ces crimes, puisque le Turd Buglar a récidivé avec d’autres manières originales de recouvrir d’excréments les étudiants et professeurs. Néanmoins, Peter est immédiatement convaincu par Chloe que Kevin est innocent, mais ce dernier ne rend pas les choses faciles.

On se retrouve alors avec une exploration de la notion de privilège dans un établissement privé qui en dit long sur le système éducatif américain. Tout cela évolue une fois de plus du côté de l’étude sociologique avec un discours assez mature sur les challenges que rencontrent les jeunes aujourd’hui en vivant à l’ère des réseaux sociaux.

Avec deux saisons qui regorgent d’idées intéressantes, qui ont des choses pertinentes à dire et qui bénéficient d’une écriture qui détourne parfaitement les codes du documentaire True Crime, American Vandal fait un sans-faute. Du moins, si l’on arrive à concilier humour immature et narration sophistiquée.