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Baron noir : les éléphants se cachent pour comploter

Baron Noir Saison 1 - Baron noir : les éléphants se cachent pour comploter

Francis Laugier vient d’être élu président de la République. À l’heure de composer son gouvernement, il doit penser stratégie politique ou récompenser le soutien de ses conseillers. Philippe Rickweart, maire de Dunkerque et un de ses amis les plus proches, se voit voler le poste qu’il convoitait.

Entre vengeance personnelle et ambition politique, tout est question de choix et de pions à faire avancer sur l’échiquier. Baron Noir, série de Canal+ en huit épisodes, nous propose d’assister à l’épopée politique et judiciaire de Philippe Rickweart et son duel avec son ancien acolyte désormais président.

« Il n’y a pas d’amitié en politique. »

Un duel au sommet du pouvoir et toutes les manipulations auxquelles se prêtent ses aspirants : voilà ce que cette première saison accomplit. Cela passe alors par le portrait d’hommes (et de femmes) avides de pouvoir, pris dans les collisions entre leurs sentiments et leurs convictions. La trahison de Francis auprès de Philippe – qui lui refuse la direction du Parti socialiste au profit d’Amélie Dorendeu – déclenche une réaction en chaîne qui bouleverse tout l’entourage du maire ainsi que la nouvelle présidence.

Philippe Rickweart est un animal politique : ambitieux, idéaliste, porté par une soif de revanche sociale. N’hésitant pas à s’associer avec une petite mafia locale pour influencer les élections ou à utiliser la confiance de Véronique, sa plus proche associée, il est prêt à tout pour obtenir ce qu’il veut. Et il l’aura. Mais à quel prix ? Celui de voir ses alliances s’effondrer même si sa capacité à rebondir impressionne régulièrement.

Malgré ses méthodes, il n’en reste pas moins un homme sincère, notamment dans la liaison « dangereuse » qu’il a avec Amélie. Bien que profondément répréhensible par ses méthodes, ses motivations nous mettent rapidement en empathie avec lui, surtout lorsqu’il fait (rarement) face à Laugier. Les lignes politiques et humaines tissées entre eux et à partir d’eux se déplacent constamment, apportant à l’ensemble de la série une imprévisibilité assez jouissive.

À l’image de cette relation conflictuelle, Baron Noir se révèle comme un dessin profond de personnages sombres et ambigus évoluant dans un survival politique référencé. Impossible de ne pas penser à The West Wing pour l’acuité des détails du système politique français ou à House of Cards dans cette construction des hommes face au pouvoir, cette confrontation de deux géants aux pieds d’argiles, portés par une morale sur laquelle ils sont prêts à fermer les yeux si nécessaire.

La série trouve son ton si particulier en prenant pleinement en compte l’époque et le lieu de ses intrigues. La politique en France, dans cette Vème République des années 2010, est malade et complexe. Les scénaristes placent alors leurs pions dans ce contexte, n’épargnant ni le langage nébuleux des politiques, ni les défauts et les qualités du système. Ils veulent – et réussissent avec beaucoup de panache – à faire une photographie de la France d’aujourd’hui, désenchantée. L’état du militantisme partisan et étudiant fait entre autres dans Grenelle (1.05) et Shutdown (1.06) en est une représentation parfaite, alimentant par l’intrigue principale, une réflexion sociale.

Si la réalisation se fait sobre, mais efficace, c’est grâce au casting que l’on se prend rapidement au jeu. S’il faut du temps pour qu’Anna Mouglalis devienne crédible (dès que son personnage accède à la présidence du PS dans le 3ème épisode, Solférino), Kad Merad et Niels Arelstrup s’imposent immédiatement. Véritable duel d’acteurs, leurs prestations individuelles et en face à face impressionnent par leur justesse et leur force, les acteurs parvenant instantanément à s’imprégner de ce milieu.

Si ces confrontations sont motrices de l’intérêt premier que l’on peut avoir envers la série, Baron Noir n’en néglige pas moins les seconds couteaux. Que ce soit les collaborateurs de Philippe (Véronique, Cyril) ou ceux du nouveau gouvernement de Laugier, chacun se dessine par rapport à ses propres convictions, impactant souvent sur l’intrigue principale.

Baron Noir n’en finit donc pas de surprendre durant sa première saison. À l’image de son final, elle n’hésite pas à bousculer l’ordre établi pour proposer une fiction audacieuse évoluant dans un terrain que l’on pense connu. Elle ne se fait pas une cartographie de l’état de la politique française aujourd’hui, mais utilise cet univers et ses codes pour construire une ambiance, des personnages, une structure possédant plus d’atouts qu’il n’en faut pour captiver. La saison 2 et ses inconnus se font déjà attendre même si cette première saison se suffit amplement à elle-même, à être une totale réussite.

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