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Coupling, la comédie sentimatalo-sexuelle de Steven Moffat

Coupling - Coupling, la comédie sentimatalo-sexuelle de Steven Moffat

Connue chez nous sous le titre peu inspiré Six Sexy, Coupling est une comédie à qui l’on a prêté le surnom malvenu de « Friends à l’anglaise » alors qu’elle empruntait une autre voie. Certes, cette création de Steven Moffat, futur showrunner de Doctor Who et Sherlock, avait sur papier des similitudes avec le méga hit américain, mais le scénariste s’appuya en premier lieu de son expérience personnelle.

De sa rencontre avec Sue Vertue, également productrice de la série, il en tira le matériel pour narrer les aventures d’un couple. Plus particulièrement, il explora les problèmes que leur relation pointait sur les rapports entre les hommes et les femmes dans une époque où l’on questionne constamment nos liens avec les autres, où vouloir faire bonne impression à l’être convoité pousse aux petits arrangements avec la réalité.

Naît ainsi Coupling, une comédie mettant en scène Steve (Jack Davenport) et Susan (Sarah Alexander), librement inspirés par Moffat et Vertue, ainsi que leurs meilleurs amis et ex respectifs. Une série de groupe donc où chaque épisode tournera autour d’une étape de la relation des principaux protagonistes. Elle se fait alors la voix de l’état des relations amoureuses et est écrite pour une génération qui doit gérer ses bagages personnels et son rapport ambiguë avec le sexe complexifiant les histoires entre hommes et femmes.

Il était une fois des gens modernes.

Coupling nous présente dès lors un groupe d’amis formé par la force des choses. Le même soir, dans le même bar, Steve rompt avec Jane (Gina Bellman) et Susan avec Patrick (Ben Miles). Le premier a quelques difficultés à faire accepter la rupture à une ex un peu folle alors que Susan se défait facilement d’une aventure sans importance. La fin d’une période en annonce pourtant une autre : la même nuit, dans les toilettes de ce bar, Steve et Susan se rencontrent et sont attirés l’un par l’autre.

Commence alors un jeu de séduction où chacun de son côté, auprès de ses meilleurs amis – Jeff (Richard Coyle) pour Steve et Sally (Kate Isitt) pour Susan – vont analyser chaque détail de leur rencontre et des étapes de leur relation pour comprendre l’autre. L’ensemble de la série se déroule donc sur ce mode d’une conversation à plusieurs entrées où s’ajoutent rapidement les deux ex, formant deux pôles distincts, mais d’égale importance. Nous avons les hommes d’un côté et les femmes de l’autre.

A travers la progression de la relation de Steve et Susan, mais aussi les petites particularités de chaque personnage, Coupling nous introduit un groupe de gens en pleine prise avec leur temps, une époque où la relation amoureuse se construit entre les deux personnes concernées par les perspectives que nos amis en ont. Les apparences sont une préoccupation essentielle de la série et nous sont présentés dans un récit voulant tordre le cou aux clichés.

Coupling bbc two - Coupling, la comédie sentimatalo-sexuelle de Steven Moffat

Une narration particulière et intelligente…

Ainsi, chaque épisode se déroule sur un schéma identique : un événement est raconté par les hommes d’un côté et par les femmes de l’autre. Le hic est qu’ils n’en ont jamais la même version. Cette construction non-linéaire – qui fait l’aller-retour entre la perception de l’histoire et le récit qui en est fait – épouse totalement le parti pris de la série, dépeignant les relations modernes en attaquant les poncifs relatifs aux hommes et aux femmes.

Si chaque fin d’épisode nous révèle ce qui s’est réellement passé pour Steve, Susan, Sally, Patrick, Jeff ou Jane, il aura fallu entre temps démêler le vrai du faux, exposant ainsi aux spectateurs l’hypocrisie des personnages qui s’arrangent avec la réalité pour se donner le beau rôle. Les distorsions qui font surface sont bien souvent hilarantes et permettent de mettre à jour les petits défauts de tous les protagonistes.

Ni les hommes ni les femmes n’en sortent particulièrement glorieux. Ils sont allergiques à l’engagement, réfractaires à la stabilité d’une relation, elles sont obsédées par le contrôle, leur apparence et autant par le sexe qu’eux. La narration fait ainsi ressortir les mensonges que l’on se raconte pour être mieux avec soi-même, conduisant chaque épisode vers une confrontation (entre Steve et Susan et, plus tard dans la série, entre Sally et Patrick) renforçant la connexion naissante parce que l’on a transcendé les divergences de points de vue pour mieux se comprendre.

… pour une série qui n’oublie pas d’être une comédie.

Coupling se construit donc sur les illusions et désillusions de personnages qui ne veulent au final qu’une chose (ou deux) : du sexe et de l’amour. Cette quête se fera alors par des détours, des quiproquos et nombreux rires. La narration particulière du show impose un ton étrange qui épouse parfaitement l’humour absurde de la série. Parce que si la création de Steven Moffat explore les relations modernes, elle n’en oublie jamais qu’elle est une comédie qui doit faire rire, ce qu’elle réussit à réaliser avec une constance remarquable.

Les différences de points de vue de chacun offrent un décalage alimentant les quiproquos hilarants. Que ce soit dans la relation entre Steve et Susan ou celle entre Sally et Patrick, les perspectives se télescopent en des saynètes drôles où le ridicule ne tue pas la relation, mais la rend plus cocasse et attachante.

Le sexe étant une composante essentielle de ces relations, il n’est pas étonnant qu’il soit au centre de nombreuses conversations. Jane, Jeff et Patrick sont particulièrement intéressés par la chose et, chacun à leur manière, parviennent à nous en faire rire. Que ce soit l’érotomanie de Jane, l’obsession de Patrick pour son pénis ou les théories sentimentalo-sexuelles loufoques que Jeff ne réussit même pas à appliquer à lui-même, Coupling fournit son comptant de scènes comiques et burlesques.

Il en ressort alors une comédie qui ne se repose pas uniquement sur ses histoires à la narration à part, mais qui la dynamise à coup de saillies humoristiques brillantes, montrant tout le talent de Moffat pour écrire des dialogues aussi drôles que profonds. Il faut un peu de temps pour s’adapter à ce ton particulier où la blague peut ne pas faire rire au premier coup, mais prend tout son sens au fur et à mesure de l’épisode.

Coupling a peut-être aujourd’hui perdu de sa pertinence et de son impact à cause des séries qui ont suivi (Shameless, Skins, Sex & The City), mais elle reste fort agréable à regarder pour sa construction inventive, ses personnages et son tempo comique assez solide.