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Séries Daredevil saison 2, parlons-en !

Daredevil saison 2, parlons-en !

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Après la critique de l’épisode de reprise, et avant de tourner définitivement la page sur la saison 2 de Daredevil, retour en compagnie de Carole et Nicolas sur cette fournée d’épisodes. Attention, l’article contient bien évidemment des spoilers.

Le pitch  : Avocat luttant contre l’injustice et aveugle depuis l’enfance, Matt Murdock (Charlie Cox) fait place au super-héros Daredevil lorsque la nuit tombe sur les rues de New York, dans le quartier de Hell’s Kitchen. La violence grimpe dangereusement avec l’arrivée du Punisher et le retour de son ancien amour, Elektra…

Daredevil saison 2 ou les Origines du Punisher

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Nicolas : Je ne sais pas toi, mais c’est la partie que j’ai préférée cette saison. Jon Bernthal est excellent, les scénaristes ont pris le risque de nous montrer le personnage dès le début, et cela s’est révélé payant. Je trouve néanmoins que son origin story trouve une fin bâclée (je ne sais pas si c’est par manque de temps ou incompétence), mais il représente tout de même une menace constante, que ce soit pour Daredevil au début (à tel point que ce dernier agit au second plan) ou pour les méchants par la suite.

J’aime aussi beaucoup l’origin story de Frank en rapport avec le développement de Karen. Je t’avais dit il y a un moment sur une discussion que je n’avais pas aimé le personnage. Ça a beaucoup changé avec cette saison ; Deborah Ann Woll est vraiment à son meilleur, et Karen s’impose comme une force silencieuse, une vigilante à sa manière. Si l’intrigue journalistique se répète un peu, ça permet au personnage de gagner en badassitude et encore une fois d’exister au-delà de sa relation avec Matt. Ce dernier est vraiment en retrait cette saison d’ailleurs. Mais ça c’est pour un autre point de la discussion :blush:. Voilà pour le début sur le Punisher du coup !

Carole : Le Punisher est clairement la réussite de cette saison 2 de Daredevil qui illustre néanmoins un problème narratif du show. En saison 1, Wilson Fisk (qu’on l’aime ou non) dominait. Cette fois-ci, c’est le Punisher. Daredevil mérite mieux que cela. J’ai eu la sensation que l’équipe créative était plus intéressée par Frank Castle que par leur héros.

Malgré cet aspect, j’ai apprécié le fait qu’ils aillent jusqu’au bout avec Castle – qu’il ne corrompe pas les origines du personnage au profit de la morale. Sur ce plan-là, d’ailleurs, la saison est redondante et superficielle. La conversation sur le toit est là pour incarner les deux points de vue et nos options sont : un mec qui tue et un autre qui croit que leur exploser la tronche et les handicaper peut-être à vie est mieux. Ouah ! Voir Castle être ce dangereux électron libre avait le mérite d’être excitant. Et Jon Bernthal domine l’écran.

Karen Page profite en effet de sa relation avec Punisher, je te rejoins sur ce point. Moins sur la qualité de l’interprétation de Deborah Ann Woll que je trouve limité. J’ai encore des blessures venant de True Blood et certaines intonations dans sa voix rouvrent les plaies ! Elle n’a pas non plus la présence de Jon Bernthal, bien que les deux acteurs possèdent une alchimie indéniable (et plus forte que lorsqu’elle est avec Murdock). L’intrigue journalistique a une construction bancale. Il est clair que Karen Page en secrétaire ne satisfaisait personne, et elle était utilisait pour tirer l’histoire dans une direction précise qui fait qu’elle a plus sa place dans un journal. Par contre, l’article au final… Qu’est-ce que le Bulletin ferait à publier un truc pareil ?  (et on a eu que le début).

Elektra, La Main et le mysticisme dans Daredevil

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Carole : Là où le Punisher possède une storyline aux enjeux bien définis (même si la fin ne boucle pas son intrigue pleinement), c’est bien plus compliqué avec Elektra. Elle est cette tueuse psychopathe à la recherche d’amour dont la place est redéfinie dans la seconde partie. Pour devenir quoi ? Cette histoire de Black Sky avec la Main est abstraite et je ne sais pas du tout ce que c’est censé signifier et où ça doit nous mener. Ce genre de trucs est frustrant au mieux, agaçant au pire.

L’histoire avec Matt fonctionne avant tout par la dynamique entre les acteurs et la nature violente de cette collaboration. Élodie Yung en impose avant tout dans les scènes de combat.

L’utilisation du personnage pour explorer l’âme sombre de Murdock m’a laissée plus dubitative. Les scénaristes n’ont pas fait dans la finesse. D’un côté : Elektra pour le justicier et la noirceur de Daredevil. De l’autre : Karen pour l’avocat et la part de lumière qui vit en Matt Murdock. Subtilité quand tu nous tiens !

Pour ne pas aider, tout ce qui entoure la Main est nébuleux. Je dois avouer avoir été étonné que l’équipe créative choisit de tirer une part de son inspiration de Shadowland. De toute l’histoire de Daredevil, ils optent pour un des arcs les plus faibles et les moins aimés de ces 10-15 dernières années. C’est juste étrange. Je n’ai rien contre un peu de mysticisme, mais il est clair qu’en coulisses, la gestion des ingrédients n’est pas maitrisée. Ils ont du mal à insérer de manière crédible des éléments de ce type dans un récit qu’ils veulent « noir et réaliste ». Je ne considère pas cela incompatible (cela fait partie de Daredevil), mais il est temps qu’Iron Fist et Doctor Strange arrivent pour instaurer une meilleure direction à suivre.

Nicolas : Tout à fait d’accord avec toi. Cet arc narratif se révèle incohérent au mieux, très pénible au pire. Au bout d’un moment, cela devient même une farce : et un ninja, deux ninjas, mille ninjas, un giga milliard de ninjas… Cela donne une représentation pas terrible de ce genre d’univers.

Mais le plus grave, c’est que cela nuit à Elektra. N’étant pas fan du personnage, j’ai pourtant trouvé la jeune femme indépendante, badass, et très complémentaire de Matt. Elle a su amener au début une touche de fraîcheur bienvenue à l’univers quand même très sombre de Daredevil. Puis patatras. Plus le nombre de ninjas augmentait, plus l’intérêt d’Elektra (et donc de Matt) baissait, tombant dans une répétition qui a donné à toute leur histoire une sensation de longueur. Franchement je me suis vraiment ennuyé devant leurs aventures, quand je n’ai pas tout simplement accéléré tout ce qui concernait Stick.

Le mysticisme n’a pas aidé, et je ne peux pas dire que cela a été mieux géré que dans Arrow. C’est dire si la subtilité était la grande absente de cette partie de la saison. Enfin, cette storyline possède au moins un point commun avec celle du Punisher : elle se finit en eau de boudin.

Foggy Nelson et le système judiciaire

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Nicolas : J’ai vraiment l’impression que cette saison a été celle des personnages secondaires. Foggy s’est vraiment révélé, tout comme Karen. On a retrouvé au début de saison l’amitié entre les trois membres du cabinet d’avocat, mais c’était pour mieux les envoyer sur des routes différentes.

Pour le coup, les scénaristes n’ont pas été extrêmement originaux : la conspiration des grands méchants autour du Punisher n’a absolument rien de nouveau. Reyes s’est montrée vraiment antipathique, ce qui n’a pas aidé. Néanmoins, cela fait toujours plaisir de voir la partie judiciaire de Daredevil. Déjà en première saison, elle représentait une composante intéressante. Et c’est la même chose ici. Foggy a vraiment tracé sa route, le procès a été gâché par Frank et Matt, alors qu’il avait vraiment bossé dessus. J’aurais d’ailleurs aimé un plus grand focus sur Foggy de la part des scénaristes. Après cela m’a tout de même permis de revoir Marcy, un personnage assez sympathique. Et au vu de la dernière scène de Foggy, il y a moyen qu’on le croise dans Jessica Jones – et peut-être même Luke Cage. Encore une fois, Foggy a bien évolué cette saison. Son arc est un peu lié à celui du Punisher, mais j’ai trouvé dommage que l’histoire du procès soit aussi classique. Et Reyes si caricaturale.

Carole : J’irais plus loin avec l’histoire du procès : elle frôle le ridicule. Tu as fait référence à Arrow sur le mysticisme et je le fais avec la partie judiciaire de Daredevil qui ne vaut presque pas mieux. Le soi-disant interrogatoire de Frank Castle par Matt Murdock était risible, il fait un plaidoyer et personne ne l’interrompt. Plus de questions votre honneur ! C’était quoi la question déjà Matt ? Ça fait mal, surtout que je juge cette partie comme une composante importante de la série. Matt est censé être l’avocat superstar, mais les scénaristes en ont fait un avocat douteux. Je saisis la route empruntée pour que ces actions l’éloignent de ses proches, mais il n’est pas avocat sans raison et tout ce que la profession signifie vis-à-vis de la problématique du superhéros est maltraité par la même occasion.

Les questions de justice sont souvent étouffées et il faut se tourner vers Foggy pour avoir une once de réflexion sur la place du système dans Daredevil et par rapport aux « justiciers » qui sévissent à Hell’s Kitchen. Le problème de Foggy est qu’il existe un peu trop pour dire à Matt quand il va trop loin. C’est un rôle qui peut être un peu usant. J’ai aimé que cela se ressente dans l’interprétation d’Elden Henson qui montrait bien que Franklin en a plus que marre de se répéter et de parler à un mur. Et en effet, sympathique retour de Marcy. J’étais triste au départ de découvrir qu’il n’était plus ensemble, c’est un personnage tertiaire qui est efficace. L’épisode 9 en saison 1 était mon préféré et leur amitié est un des éléments que j’aime le plus – quand Matt ne se comporte pas en abruti pour être gentille –, alors il était agréable de le voir prendre le contrôle et afficher ses compétences. La scène dans l’hôpital avec Claire était excellente là-dessus.

Étrangement, par contre, l’aspect conspirationniste ne m’a pas dérangé dans son classicisme. Des fois, il vaut mieux faire simple pour développer le reste. J’aurais pu faire avec un portrait de Reyes moins caricaturale, c’est clair.

Les retours surprises

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Carole : Je regrette parfois que les shows fassent la promotion d’un mort ou de l’arrivée d’un personnage qui détruit l’élément de surprise. Ce fut donc avec plaisir que j’ai découvert que Wilson Fisk était présent dans cette saison 2. Il n’est pas le seul à faire son retour, mais c’est sans conteste le plus efficace et le plus pertinent à mes yeux.

Je m’étais dit qu’ils allaient le garder en prison et nous le ramener en saison 3. Ils ont eu la judicieuse idée de ne pas le faire, confirmant sa place de grand méchant dans Daredevil – malgré certains éléments à la prison quelque peu risible. Cela en valait la peine rien que pour le face-à-face non pas avec le Punisher mais avec Matt Murdock. Charlie Cox se fait à juste titre écraser par Vincent D’Onofrio et Le Caïd en ressort plus que jamais au contrôle bien qu’il soit coincé entre 4 murs.

Le retour de Madame Gao ne m’est pas apparu nécessaire, mais elle est toujours bien utilisée et j’espère qu’elle aura un rôle à jouer dans Iron Fist. Celui de Nobu m’a laissée plus dubitative. Je crois que cela vient du fait que ça ne m’a pas choqué le moins du monde alors que cela aurait dû et que le personnage a perdu une part de sa splendeur avec sa résurrection. Il y avait pourtant de quoi surprendre, mais non. Peut-être que si Matt s’était mis à paniquer face à ce que ce retour impliquait vraiment. 1 minute de choc à peine et une dose d’incompréhension.  C’est traité comme tout le reste alors que le type est revenu d’entre les morts.

Nicolas : J’ai pensé exactement comme toi pour le retour de Fisk. En plus, ils ont vraiment bien joué le coup, signalant son côté special guest star au générique de fin de l’épisode. Rien à redire sur ce côté-là. J’avais bien aimé Fisk en première saison, et c’est pareil ici. Il impose une présence qu’on a du mal à ignorer. La prison c’est du classique, on a le droit encore et toujours à la même chose. Après, ça possède un lien avec le Punisher, et cela s’inscrit également dans la lignée de ce que le Caïd est et fait. Et je suis tout à fait d’accord avec ce que tu dis que la rencontre Matt/Fisk. Le pauvre, il se fait véritablement manger. Lorsqu’il y aura saison 3 (je ne connais pas vraiment le planning Netflix, avec notamment les Defenders qui vont bien finir par arriver), le caïd sera bien entendu de la partie.

Pour Madame Gao, je n’étais déjà pas fan des longs monologues en saison 1, donc j’ai somnolé devant toute la scène avec Daredevil. En fait, je n’aime pas ce qu’ils ont fait avec la Main, ce qui m’inquiète justement pour Iron Fist, vu que cela opérera probablement dans les mêmes eaux. Et Nobu… no comment. Je me doute que la mort s’apparente à un état d’esprit dans les séries de superhéros, mais le traitement de son retour aurait pu être mieux géré, comme tu le dis. Il a complètement perdu de sa superbe. On n’a senti aucun danger émaner de son retour, ce qui est légèrement dommage lorsque tu veux imposer la menace qu’est censée représenter la Main.

Matt Murdock/Daredevil, le syndrome du héros

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Nicolas : J’ai franchement trouvé Matt très antipathique cette saison. Cela n’a rien à voir avec l’interprétation de Charlie Cox, mais durant cette salve d’épisodes, ils ont mis Matt sur le chemin de tous les superhéros jamais inventés : il s’exile de ses amis, il porte le poids du monde sur ses épaules, et refuse l’aide qu’ils auraient peut-être pu leur apporter. Je me doute que c’est un passage obligé, mais je pense que c’est le revers de la médaille lorsque tu regardes tous les shows de ce genre : à un moment, tu es lassé. Même Supergirl a passé un épisode à le faire !

Pour en revenir à Daredevil en elle-même, vu que le parcours de Murdock en tant que superhéros est lié à Elektra, la Main et Stick, je n’en ressors que très peu convaincu. Les scénaristes ont isolé Matt de ses amis pour le mettre sur la route  devant faire de lui un vrai superhéros, mais ils ont perdu de vue en chemin ce qui rendait la série agréable à suivre : l’amitié entre Karen, Foggy et Matt.

Je n’ai d’ailleurs pas spécialement envie d’élaborer sur la romance Karen/Matt ; elle est mieux écrite que celle sur la CW (ou CBS), mais l’équipe créative reste encore une fois plus concernée par créer du conflit inutile que de laisser ses pauvres personnages tranquilles. En fait, j’ai l’impression que Matt/Daredevil (le superhéros cette fois-ci) a été mangé par les événements de cette saison 2. À trop être consumé par son complexe de superhéros, à trop vouloir sauver les gens au péril de sa vie (et surtout du bon sens), il s’est finalement retrouvé en spectateur de ce qui se passait autour de lui.

Donc si tu veux, je n’ai pas été emballé par le voyage du personnage parce qu’il est beaucoup trop classique et assez mal effectué. Cerise sur le gâteau en plus :  il fallait qu’il ait une motivation supplémentaire pour la prochaine saison. Un procédé que je hais dans les séries.

Carole : J’ai lu quelqu’un qui a écrit qu’il aimait bien le fait que les scénaristes ont repris l’arrogance de Murdock du run de Bendis. Un trait de sa personnalité dont je ne suis sincèrement pas fan et que j’ai été heureuse de voir mettre en veilleuse sous Mark Waid (au ton plus léger de toute façon). Je n’avais pas fait le lien, mais c’était bien vu !

Le syndrome du sauveur est inévitable dans une série de ce type. Ironiquement, Person of Interest s’y est frotté avec plus de succès à mes yeux, surtout que Reese n’est pas condescendant (ça aide !). Je pense que la similitude des thématiques dans le genre n’est pas le problème. Combien sont définis par une tragédie familiale ? Pour autant, cela ne mène pas au même résultat et une problématique peut-être abordée et traitée différemment. L’équipe de Daredevil n’est pas parvenue à apporter quelque chose de neuf à cette discussion.

Matt Murdock est imparfait, il y a de la marge pour l’amélioration en tant qu’ami, avocat et justicier. Sur ce plan-là, la mise en valeur de ces défauts n’est pas une mauvaise idée, l’exécution est plus regrettable, car il est difficile d’embrasser la spirale destructrice dans laquelle il se lance volontairement ou non. Il est clairement signifié qu’Elektra a cet effet sur lui, faisant imploser sa vie, ce qui fonctionne à une échelle, mais entraine le personnage dans une histoire loin d’être excitante.

Tout est développé autour de lui pour porter un constat sur la nature du héros, mais Matt/Daredevil n’est pas celui qui profite de la réflexion, ce sont tous les autres. Son isolement et son besoin de sauver tout le monde seul sont explorés à un niveau superficiel. Peut-être parce qu’on ne passe pas tant de temps que cela avec lui ? Peut-être, car il suit en effet plus le mouvement qu’il n’est un membre vraiment actif de sa propre storyline – à la différence de Frank, Karen et Foggy. Comme toi, je préfère ne pas trop m’arrêter sur la romance Karen/Matt, bourrés de problème dont le manque d’alchimie entre les acteurs.

Pour le coup, je terminerais avec le fait que Marvel a été pas mal critiqué pour avoir beaucoup de méchants génériques et sans intérêts au cinéma. Daredevil a trouvé à sa manière le moyen d’éviter ce phénomène, mais finalement au détriment de son héros qui se fait voler la vedette.