Le Docteur est sollicité par le Pape pour percer le mystère du Veritas, un livre capable de pousser ses lecteurs au suicide. Toujours aveugle, il devra alors compter sur l’aide de Bill et Nardole pour découvrir les sombres vérités dissimulées au cœur du Vatican.
Depuis le début de cette saison 10 de Doctor Who, rien ne laissait présager que le récit emprunterait cette direction. Après tout, l’histoire du caveau n’avait été qu’un léger fil rouge censé alimenter la curiosité. Résoudre le mystère dans les premières minutes de ce sixième épisode pour faire de la place à un arc narratif inattendu est alors un pari risqué, mais sans conteste payant.
Il faut dire que Moffat — qui signe ici le scénario — avait pris l’habitude d’en faire trop pour arriver à ses conclusions. Le voir faire dans la demi-mesure en capitalisant sur le bagage émotionnel plutôt que sur le grandiose est une amélioration qui donne une chance à l’histoire de gagner en puissance. Pas de signes avant-coureurs ni d’indices disséminés çà et là que les spectateurs les plus avisés auraient pu piocher précédemment. Au lieu de cela, Moffat tire complètement le tapis de sous nos pieds pour nous entraîner dans une aventure qui promet d’être forte en rebondissements.
L’une des grandes réussites de cet épisode de Doctor Who est d’utiliser le handicap du Docteur comme un vecteur de tension. Le fait qu’il se retrouve dans cet état d’extrême vulnérabilité et de dépendance alors que le monde a besoin de lui crée ce sentiment qu’il pourrait pour la première fois abandonner. La prestation de Capaldi n’y est d’ailleurs pas pour rien. Sa manière d’injecter de la peur et de l’incertitude dans son jeu tout en maintenant cette retenue qui définit son interprétation parachève cette impression que le Docteur se retrouve pour la première fois dans une impasse. Ce qui est habilement souligné par une révélation finale sur laquelle il n’a aucun pouvoir.
Il est certain que le Docteur s’en sortira, même s’il pourrait bien en payer le prix, mais cela n’enlève en rien l’impact des réalisations respectives de Nardole (Matt Lucas) et Bill (Pearl Mackie). Les dernières minutes confirment peut-être qu’il n’y a pas trop d’inquiétude à avoir à leur sujet, la surprise de leur découverte et leur bouleversement respectif n’est pas sans tirer sur la corde sensible.
À vrai dire, ce sixième épisode joue en priorité avec nos émotions et n’essaie pas forcément de divertir, malgré les habituelles répliques scénaristiques. En ce sens, les flashbacks expliquant comment et pourquoi Missy (Michelle Gomez) s’est retrouvée prise au piège du caveau sont teintés d’une tristesse assumée. Son retour avait beau ne pas être une surprise, la ramener aussi fragile et comme un écho à la détresse du Docteur est un choix intelligent qui capitalise sur le talent de Michelle Gomez et Peter Capaldi au moment d’embrasser du matériel dramatique.
Ce sixième épisode est clairement étonnant, à défaut de sortir complètement du carcan Doctor Who, et surprend par une intrigue qui prend à contrepied. Il aura fallu attendre la mi-saison pour que l’arc narratif majeur soit révélé, ce qui n’est pas une mauvaise chose. Moffat n’est pas exempt de défaut, mais prouve une fois de plus l’ampleur de sa maîtrise quand il écrit au plus proche de ses personnages.