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Genius: Picasso ou l’art du conventionnel

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genius picasso saison 21 - Genius: Picasso ou l’art du conventionnel

Le titre de l’anthologie de National Geographic nous dit tout : elle s’intéresse à des génies. Après avoir consacré sa première saison au physicien Albert Einstein, l’équipe créative de Genius menée par Ken Biller a aiguisé son crayon pour nous narrer en saison 2 l’existence du peintre Pablo Picasso.

Sur papier, l’artiste a tout pour donner forme à un biopic digne de ce nom. Considéré comme l’un des artistes les plus importants du XXe siècle, il a produit plus de 50 000 œuvres ; il est aussi l’un de ceux qui rencontra un énorme succès de son vivant, il côtoya de grands noms de l’époque et multiplia les femmes pour nourrir son art.

Avec Albert Einstein, Genius nous présentait le scientifique comme une multitude d’équations à résoudre. Chaque épisode ou presque travaillait sur un pan particulier pour déchiffrer l’homme, le génie et les sciences. La conceptualisation des théories d’Einstein, les deux lignes parallèles et les juxtapositions des thématiques entre les différentes figures historiques aidaient le récit à prendre vie.

Picasso est un génie d’un autre genre. Pour autant, l’équipe créative de Genius choisit de suivre la formule établie au cours de la première saison. Elle reprend la conception sur les deux lignes temporelles, favorisant au départ un peu trop la version âgée incarnée par Antonio Banderas. Dans la peau du jeune Picasso, Alex Rich doit initialement suivre la ligne tracée par Banderas plus que celle du peintre.

Einstein et Picasso ayant vécu en grande partie à la même période (ils sont nés à deux ans d’écart, Picasso a vécu beaucoup plus longtemps), l’esprit ne peut s’empêche de nouer des liens qui desservent l’histoire du peintre. En somme, les similitudes se multiplient et l’histoire n’est pas élevée par des procédés techniques ou narratifs qui nous aideraient à comprendre ce qui se passe dans la tête de Picasso.

Cette saison 2 de Genius souffre du plus grand mal qui ronge le genre du biopic : elle est tragiquement conventionnelle. À tel point, en fait, que Picasso peut se faire voler la vedette par ses amis hauts en couleur (Seth Gabel en Apollinaire est particulièrement inspiré).

Ces derniers ont le mérite d’exister par eux-mêmes alors même que les femmes de la vie de Picasso doivent se battre bec et ongles pour avoir ce privilège dans la série. La photographe Dora Maar doit énormément à l’interprétation de Samantha Colley (Mileva dans la saison 1) qui mérite clairement d’être plus qu’un second rôle dans cette anthologie.

Elle n’est pas la seule à mettre l’énergie pour que l’on puisse voir au-delà de la muse et de la compagne de Picasso une femme qui a été exploitée. Progressivement, la série finit par dépeindre ce Picasso vampire qui suçait l’essence des femmes qui l’entourait pour son art et les délaissait quand elles ne l’inspiraient plus.

Si le récit tourne autour de ce point et met du temps à le faire explicitement, cela vient à l’évidence du mal rencontré à illustrer le travail de Picasso. L’artiste insiste sur la nécessité de connaitre les règles pour mieux les détruire, mais l’équipe de Genius ne prend même pas le temps de les introduire et préfère en vérité nous prendre par la main pour nous dire ce que l’on doit ressentir vis-à-vis de son travail.

L’histoire sur le plan artistique en devient terriblement didactique. Comme l’artiste qui refuse de montrer son œuvre avant qu’elle ne soit complète, Genius cache la toile pour que l’on ne le voie pas travailler. Les dialogues nous explicitent où nous en sommes, mais la série passe d’un courant à un autre, d’une révolution artistique à une autre sans mettre dignement en exergue ce que cela représente.

Genius : Picasso ne se présente donc pas comme la biographie (sérielle) ultime du peintre. Elle souffre de reprendre le schéma établi en saison 1 et elle tarde à laisser son sujet prendre le dessus (Alex Rich est placé trop longtemps dans l’ombre de Banderas). Ces choix en font une œuvre qui se montre trop consensuelle alors que c’est bien un terme qui ne devrait pas être associé avec génie.

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L’anthologie Genius a déjà été renouvelée pour une saison 3 qui sera consacrée à l’auteure Mary Shelley.