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Séries Suits Suits ou l’expérimentation de la routine dans le monde des séries

Suits ou l’expérimentation de la routine dans le monde des séries

Suits Saison 5 - Suits ou l’expérimentation de la routine dans le monde des séries

Il existe un certain point où l’on arrive à comprendre une série. Les mécanismes deviennent de plus en plus limpides, l’on commence à deviner ce qui va se passer. Les personnages n’ont plus de secrets pour nous, chacune de leurs actions ont un sens et le moindre changement nous impacte. Ce n’est pas forcément une mauvaise chose, c’est juste la manière dont cela fonctionne.

Suits en est aujourd’hui à sa cinquième saison. L’incapacité de la série à prendre des risques et de sortir des sentiers battus est connue, même si cela n’affecte pas son succès. Chaque saison, Harvey Specter résout des affaires compliquées à coups de jurons et de références cinématographiques. Chaque saison, les femmes servent plus ou moins de faire-valoir aux avocats de Pearson-Specter-Litt, pour le bonheur des amateurs du Bechdel Test. Chaque saison, Louis reste mesquin et souhaite juste qu’on le considère comme l’égal d’Harvey.

En regardant le dernier épisode en date – le sixième – Louis s’adresse à Donna, disant que l’ancien Louis a besoin de ressortir, mesquineries et insécurités incluses. À ce moment-là, quelque chose m’a frappé : Suits ne changera jamais, mais ce n’est pas un problème.

Si Suits a toujours autant de succès alors que sa formule n’évolue pas et que les enjeux sont éternellement bas, pourquoi devrait-elle changer de cap ? Elle est encore divertissante, possède des musiques sympas et l’interprétation reste bonne. Que l’on connaisse tout à l’avance n’a pas de répercussions sur les qualités de la série. Évidemment, une touche de nouveauté ne ferait pas de mal, mais après tout, on peut se complaire dans la routine – si on arrête un moment de se poser des questions.

Je suis un peu de mauvaise foi. La cinquième saison possède tout de même le mérite de ne pas se limiter aux seules affaires d’avocats en manque de petites disputes pour savoir qui est le meilleur – pour le dire poliment. À la suite des évènements du season finale précédent, Donna quitte Harvey et part travailler pour Louis. Harvey va dès lors voir une psychologue, interprétée par Christina Cole, et l’on entre enfin dans la psyché d’un personnage – il faut bien le reconnaitre – plutôt antipathique. Les effets ne sont pas encore visibles, mais au vu de la fin de cet épisode six, cela se dirige dans le bon sens.

Je me méfie néanmoins des épisodes à la Privileged (5.06). Les scénaristes de Suits m’ont trop habitué à mettre des changements en place, juste pour les stopper un, voire deux épisodes après, préférant le confort de ce qu’ils savent faire. En lui-même, l’épisode est l’un des meilleurs que la série a produit depuis longtemps. Chaque personnage trouve un moyen de briller, mais il reste toujours cette impression lancinante : quoiqu’il se passe, quoiqu’il arrive, les choses ne vont pas changer.

Harvey semble être sur la voie pour enfin devenir autre chose qu’un sociopathe portant de beaux costumes. En cela, Suits fait un pas vers un nouveau territoire. Cela m’a touché parce que j’ai passé tellement de temps à me demander pourquoi les scénaristes tentaient de rendre sympathique quelqu’un qui ne l’était clairement pas. Maintenant je suis intrigué.

La routine est un phénomène commun dans la vie et ce n’est pas étonnant qu’elle affecte également le monde des séries. Elle installe un rythme tellement familier qu’il devient facile de laisser passer des choses qui, en temps normal, ne le devraient pas. Je tape sur Suits, mais de nombreuses autres séries déjà bien avancées dans leur existence produisent le même effet – je pense notamment à The Big Bang Theory. Le fait même qu’elle essaye de s’améliorer se révèle être un point positif. Reste à savoir si la routine va à nouveau trouver son chemin à Pearson-Specter-Litt ou est-ce que cette cinquième saison va enfin permettre d’observer quelque chose de nouveau.

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