Il y a toujours eu un léger facteur nostalgique dans This Is England. Que l’on soit Anglais ou non, la musique, les évènements historiques, l’atmosphère, tout baigne dans une autre époque qui reste tangible pour beaucoup de monde, même si ce n’est que de manière très furtive. Pratiquement une décennie après le tournage du long métrage à l’origine de toute cette histoire, reconnecter avec Lol (Vicky McClure), Woody (Joe Gilgun), Shaun (Thomas Turgoose), Gadget (Andrew Ellis), Kelly (Chanel Cresswell), Milky (Andrew Shim), Harvey (Michael Socha) et les autres ajoutent clairement à ce sentiment nostalgique, tout comme le fait de savoir que c’est très certainement la dernière fois que nous les retrouvons.
This Is England ’90 nous entraine ainsi vers des adieux, mais n’a pas totalement la forme d’une conclusion. Cela ne l’empêche pas de gérer les retombées d’évènements s’étend produits dans les précédentes mini-séries et le film. Cela est tout particulièrement présent durant la seconde moitié qui est marquée par les horreurs passées qui reviennent à la surface.
Le format a évolué, chaque épisode couvrant une saison (du printemps à l’hiver), mais la force dramatique ne s’est pas diluée pour autant. Quand les cicatrices se rouvrent, tout le monde souffre et, après avoir justement traversé tant de choses avec Lol, Woody et leurs proches, il est pratiquement impossible de ne pas sentir les coup qu’ils encaissent.
This Is England ne peut bien entendu pas uniquement être défini par ses tourments émotionnels, même si peu de séries parviennent à en délivrer avec autant d’authenticité et d’intimité. C’est en quelque sorte devenu une affaire personnelle avec les années et si cela fonctionne avec les moments dramatiques, il en est de même avec les instants de bonheur.
C’est d’ailleurs la formule de Shane Meadows. Pour chaque opus de This Is England, il nous met à l’aise avec des courtes périodes d’oisiveté, avec ses histoires d’amitié. Il laisse progressivement s’immiscer la noirceur et la douleur, proposant une montée en puissance qui devient rapidement un véritable grand huit. C’est particulièrement le cas avec ce voyage en 1990 qui montre comment Lol et Woody construisent réellement leur futur ensemble là où les autres cherchent encore une route à suivre.
Shaun se retrouvera ainsi à occuper un rôle secondaire qui illustre bien l’idée que tout le groupe entre définitivement dans l’âge adulte. Il prend progressivement sa vie en main. Il lâche petit à petit ce qui l’empêchait d’avancer et s’engage dans une direction qui laisse penser qu’il a un avenir devant lui. Cela n’est pas aussi évident à faire pour Kelly.
La sœur de Lol a longtemps été épargnée par ce qui est arrivé à sa famille à cause de son âge, mais elle doit à présent être confrontée à la réalité sur son père et cela fait de la jeune femme l’élément instable de la mini-série.
Shaun et Kelly, plus que les autres encore, montrent combien retrouver ces personnages régulièrement sur une décennie a permis à This Is England de raconter son histoire de façon unique. Shane Meadows voulait nous parler de son Angleterre et nous a dès lors intégrés à celle-ci à l’aide de son écriture et de sa mise en scène qui ne nous positionnaient pas seulement en simple témoin, mais nous réservaient une place auprès de ce groupe d’amis.
This Is England ’90 est censée être la fin du voyage et, s’il n’y a jamais de suite, elle offre la conclusion douce-amère qui sied parfaitement à cette histoire. L’Angleterre tourna une page et cette mini-série s’est chargée de faire de même. Ce ne fut une nouvelle fois pas forcément évident à regarder d’un bout à l’autre, mais il ne pouvait pas en être autrement.
Adieu Thatcher, adieu l’Angleterre des ‘80s et adieu This Is England.
This Is England ’90 a été récompensée aux BAFTAs 2016, décrochant le prix de la meilleure mini-série, tandis que Chanel Cresswell (Kelly) décroche le prix de la meilleure actrice dans un rôle secondaire.