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Les séries ont la vie dure sur le câble, et c’est la faute du streaming

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Mr Robot Saison 2 Angela - Les séries ont la vie dure sur le câble, et c’est la faute du streaming

En juin 2016, j’écrivais sur le rebranding du câble (basique) ou comment la volonté des chaines de se démarquer transformait le paysage télévisuel américain. Un an plus tard… La transformation se fait difficilement. Et on pourrait bien blâmer le streaming, si on voulait chercher un coupable.

Rien n’est jamais aussi simple que cela. Le paysage télévisuel est transformé d’une saison à l’autre, ce qui n’est pas nouveau d’hier. On peut assister à la naissance et à la mort d’un mouvement avant même d’en avoir pris conscience. Le streaming a participé à modifier les habitudes, et cela a un impact sur la production.

Pour s’affirmer dans ce paysage sériel en transformation, des networks comme USA Network ont décidé de se rebrander, à l’aide de shows comme Mr. Robot et Colony. Si la chaine a en partie réussi à se détacher de ce que l’on pouvait attendre d’elle, d’autres comme Freeform nous illustre à quel point se transformer est un exercice difficile. On peut revenir à USA Network qui, avec un épisode spécial de Psych pour Noël, a choisi de reconnecter avec ses racines — la preuve qu’elle n’a pas complètement su s’émanciper de son image passée et qu’elle n’en a peut-être pas totalement envie.

Ce qu’USA Network tente de faire à son échelle se retrouve chez TNT. Lorsqu’est venu le temps de se réinventer, cette dernière n’a pas caché son désir de récolter des statuettes à un moment ou un autre. Ce n’est cependant pas si aisé que cela à faire — il faut LES séries et le budget pour la campagne — et il faut satisfaire les annonceurs en attendant.

L’image de TNT a été ébranlée grâce à Animal Kingdom ou Good Behavior. Néanmoins, les responsables ont, semble-t-il, fait quelque peu marche arrière en cours de route et revu leurs ambitions.

TNT, à sa manière, joue sur différents tableaux. Elle reste la chaine de Major Crimes et de The Librarians, et celle qui diffusera The Alienist. Et, on peut se demander si quelqu’un ne s’est pas dit : pourquoi choisir ? Pourquoi ne pas être plusieurs choses à la fois ?

Il est difficile à l’heure actuelle de définir ce qui fait un show TNT, le network allant dans de multiples directions, à la recherche de ce qui fonctionnera le mieux, à la fois pour le public, les annonceurs et le prestige.

Et pourquoi pas ? D’une certaine manière, on peut y voir une application de la formule Netflix qui ne fait pas une série pour un large public, mais pour une niche. Et inonde le marché de nombreuses productions — les siennes et celles achetées venant d’autres pays.

L’offre n’a jamais été aussi importante, et le téléspectateur n’a que l’embarras du choix. Ajoutons à cela la possibilité de regarder à son rythme – en binge intensif, à coups de plusieurs épisodes ou sans se presser – sur les services de streaming, et on se retrouve face à une audience dispersée qu’il est parfois difficile de mesurer.

Le développement du streaming a également eu un impact notable sur la syndication. Aujourd’hui, plus besoin d’atteindre les 85-100 épisodes, assurant parfois un bel avenir grâce à l’argent d’un contrat passé avec un service de vidéo à la demander ou la fin d’un show qui n’aura pas été regardé sur la plateforme.

Ces changements affectent toute l’industrie, le câble basique étant frappé de plein fouet par l’offre que l’on retrouve sur le streaming. Cela peut les aider – Breaking Bad et Sons of Anarchy ont en profité en leur temps pour grossir leur audience. Mais c’est à double tranchant, car les journées ne font toujours que 24 heures. Et les services de streaming sont logiquement plus intéressés par faire regarder leurs productions que celles de quelqu’un d’autre.

Selon l’étude annuelle menée chez FX, nous avons eu 455 séries scriptées sur le sol américain —  grands networks, câble et services de streaming confondus. Et les derniers sont ceux qui produisent de plus en plus. Dans un tel contexte, il n’est pas étonnant que certains n’y trouvent pas leur compte.

Au-delà des échecs, il y a bien entendu les mouvements financiers qui viennent bousculer le câble. Tout reste une question d’argent et cela modifie aussi le paysage télévisuel.

Alors que WGN America avait émergé comme une chaine nous proposant des séries avec une identité forte, le rachat de Tribune Media par Sinclair Broadcast Group met un terme à leurs efforts créatifs. Dans quelques années, leur petit catalogue de créations originales sera sûrement considéré comme un composé de séries cultes.

Elle n’est pas la seule à s’éloigner de l’univers des séries, c’est aussi le cas de MTV, avec le groupe Viacom qui a décidé de redéfinir l’approche éditoriale de ces chaines. Ce n’est pas un choix si difficile que cela à comprendre, ces derniers ont sûrement des chiffres leur signifiant que cela n’est pas payant. MTV est destinée à revenir aux sources — la musique dans son cas — alors que Spike TV doit se transformer en Paramount TV pour devenir LA chaine série, si tout va bien, du groupe. En attendant que cela prenne forme, des séries sont annulées.

La production ne cesse de grossir, mais les chiffres nous le disent : cette progression vient des services de streaming. La situation s’est tassée pour le câble basique, arrivant à un moment de son histoire où continuer à produire n’apporte plus assez. Entre le difficile rebranding et une concurrence intense, les chaines du câble basique cherchent à redéfinir leur place dans la vie des téléspectateurs de séries.