Alors que, sur le petit écran américain, la mini-série paraissait être en voie de disparition totale il y a encore peu de temps avec seulement HBO et SyFy pour réellement continuer à en produire de manière régulière, il apparait à présent que le vent a quelque peu tourné. Le format profite de la popularité accompagnant les nouvelles anthologies qui offre concrètement une mini-série par saison afin de faire un réel retour.
Par définition, une mini-série nous propose ainsi simplement une histoire complète qui est racontée entièrement sur un nombre prédéfini de parties. Cela peut aller de minimum 2 épisodes à ce qui pourrait s’apparenter à une saison entière – 13 est un maximum.
Bien entendu, à la base, le format n’est pas uniquement employé dans les séries TV, car il peut être mis en pratique pour tout ce qui est sérialisé – le comic book est l’autre média à principalement user du concept. De plus, même si nous parlons ici de sa place sur le petit écran américain, il reste dominant en Angleterre. Il faut dire que la télévision britannique, avec ses saisons assez courtes, se prête bien à cette approche créative.
La taille est par ailleurs une source de confusion en France. Les mini-séries les moins longues sont souvent assimilées à des téléfilms chez nous, étant alors diffusées comme un seul et unique programme – quand elles ne sont pas simplement remontées pour prendre justement la forme d’un film.
En Angleterre, la mini-série s’est installée dans le paysage audiovisuel depuis longtemps, puisque c’est The Quatermass Experiment de 1953 – en six épisodes – qui la popularisera. Il s’agit d’un programme de science-fiction, un genre qui est populaire dans le domaine des mini-séries, mais quand même bien moins que le récit historique.
Aux États-Unis, le format fut introduit alors par PBS qui programmait des productions britanniques dans son Masterpiece Theater dont la qualité et le succès ne passa pas inaperçu. Cela inspira les networks américains. NBC a été le premier à tenter l’expérience en novembre 1973 avec The Blue Knight – basée sur le roman éponyme de Joseph Wambaugh. Composée de 4 épisodes, elle mettait en scène William Holden dans la peau d’un flic vieillissant qui avait peur d’être mis à la retraite alors qu’il enquêtait sur une affaire compliquée à la suite du meurtre d’une prostituée.
Venant du créateur de la série Police Story, cette mini-série aurait très bien pu intégrer l’anthologie criminelle qui débutait bien sur la chaine. Néanmoins, NBC décida de programmer The Blue Knight sur 4 soirées consécutives. Si Holden remporta un Emmy Award pour sa performance, les audiences ne furent pas exceptionnelles. Elles ne furent cependant pas assez mauvaises pour tuer le format, en dépit de quelques critiques qui suggéraient que cela demandait trop d’attention aux téléspectateurs pour fonctionner.
Dès l’année suivante, ABC s’y essaya malgré tout à son tour avec QB VII. Cette adaptation du livre éponyme de Leon Uris sur un docteur polonais jugé pour ses actes dans un camp nazi – avec Ben Gazzara et Anthony Hopkins dans les premiers rôles – dura 6 heures et fut diffusée en deux parties, les 29 et 30 avril. QB VII séduisit plus, s’imposant à la cinquième place des programmes les plus suivis la semaine de sa diffusion.
Après une telle performance, ABC saisit le potentiel d’avoir des séries évènementielles de ce genre et en mit plusieurs en chantier. En janvier 1976, la mini-série en deux parties Eleanor and Franklin avec Edward Herrmann et Jane Alexander se fit remarquer, notamment par les Emmy Awards, mais ce ne fut rien comparé au succès public de celle qui suivit : Rich Man, Poor Man. Cette adaptation du roman d’Irwin Shaw se composa de 9 parties avec Peter Strauss, Nick Nolte et Ed Asner et fut diffusée entre février et mars de la même année. En plus de remporter 4 Emmy Awards, la série s’imposa comme étant le second show le plus populaire de la saison (derrière All In The Family).
Nous avions là le premier véritable succès pour une mini-série, mais celle qui donna au format ses lettres de noblesse est indéniablement Roots (Racines en VF). Adaptation de l’œuvre d’Alex Haley programmée en 1977 (du 23 au 30 janvier), elle fait encore aujourd’hui partie des programmes les plus suivis de l’Histoire de la télévision américaine. Elle fut diffusée durant 8 soirées consécutives sur ABC – le final établissant à l’époque un record d’audience historique avec 71% de parts de marché pour environ 80 millions de téléspectateurs.
Non seulement Roots captiva le pays et fut couverte d’Emmy Awards, elle changea la manière dont les Américains allaient parler de l’esclavagisme et de l’expérience des Afro-Américains dans son ensemble. Cette mini-série est devenue un véritable symbole culturel.
Bien entendu, les networks ont poursuivi après cela à programmer régulièrement des mini-séries. Certaines, comme Shogun (1980) et The Thorn Birds (1983) avec Richard Chamberlain, mais aussi North and South (1985) et Lonesome Dove (1989), ont à leur tour été des succès. Cela continua ainsi jusqu’à la fin des années 90.
En février 2000, NBC proposa The 10th Kingdom sur 5 soirées consécutives. Malgré le budget colossal (44 millions de $) et une promotion de taille, la mini-série de fantasy ne délivra pas les audiences attendues. Après cela, les networks ont réduit leurs investissements dans ce format, mais également dans les téléfilms évènementiels qui avaient aussi proliféré durant toute cette période. Le petit écran américain était à un tournant – la RealTV prenait son envol, les couts de production évoluaient et la concurrence venant du câble changeait la donne.
Durant la décennie qui suivit, en dehors de SyFy avec ce qui est devenu sa traditionnelle mini-série de décembre – dont la désormais incontournable Battlestar Galactica en 2003 qui est son plus gros succès critique et public dans le genre –, c’est HBO qui se révèlera être la chaine vers laquelle se tourner pour retrouver des séries de ce type.
From the Earth to the Moon donna le ton dès 1998, mais ce sont Band of Brothers (2001) et Angels in America (2003) qui ont imposé au public l’excellence de ce que pouvait proposer la célèbre chaine câblée dans le domaine. Ce sera cependant l’excellente John Adams en 2008 – même année que l’également très bonne Generation Kill de David Dimon – qui marqua en devenant la mini-série la plus récompensée de l’Histoire aux Emmy Awards avec 13 trophées mérités.
En dépit de ce que peut encore produire HBO, c’est vers History qu’il faut se tourner pour trouver la source du récent retour en grâce de la mini-série. Avec Hatfields & McCoys qui réunissait Kevin Costner et Bill Paxton pour raconter un célèbre conflit familial purement américain, la chaine câblée à montrer que l’on pouvait la prendre au sérieux et récidiva alors avec l’épique récit religieux The Bible.
C’est également à cette période que l’approche du concept d’anthologie choisie par Ryan Murphy et Brad Falchuck sur American Horror Story allait, à sa manière, donner une nouvelle forme à la mini-série. L’idée est concrètement que chaque saison est une mini-série qui est liée aux autres par son genre, ses thématiques ou ses acteurs. True Detective a par la suite suivi cette voie en 2014 et devint à son tour un phénomène dont la seconde saison montra les limites.
En dépit de ce regain pour la mini-série – sous une forme ou une autre – qui prend principalement racine sur le câble, les grands networks s’y intéressent à présent de nouveau, en particulier ABC. Cela dit, ce sont sur les chaines du groupe A&E que la nouvelle version de Roots verra le jour, témoignant de l’évolution concrète du paysage télévisuel américain.
Dans tous les cas, la mini-série continue de prospérer sur le petit écran anglais et il semble donc que, pour le moment, elle ait retrouvé des forces de l’autre côté de l’Atlantique. Comme War & Peace le rappelle, il y a certaines adaptations qui sont vraiment adaptées à ce format.