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Locke & Key : Avant la série Netflix, un comics entre drame familial et horreur fantastique

locke and key - Locke & Key : Avant la série Netflix, un comics entre drame familial et horreur fantastique

Il aura fallu près de 10 ans pour qu’une série Locke & Key voit le jour. En 2010, une première adaptation est en développement chez FOX mais, après un pilote, n’aboutira pas. Après un détour par une possible trilogie cinématographique, le comic culte de Joe Hill et Gabriel Rodriguez a retrouvé la route du petit écran, passant par Hulu avant de finalement arriver sur Netflix.

Suite à la récente mise en ligne d’une saison 1 de Locke and Key qui revisite à sa sauce les éléments du comics, c’est l’occasion de revenir sur le matériel d’origine, devenue œuvre de référence dans le comic book, parfait mélange entre le drame familial et l’horreur fantastique.


Tout commence dans la tragédie pour Locke & Key puisque Tyler, Kinsey, Bode et leur mère Nina Locke déménagent à Lovecraft, ville du Massachusetts pour s’installer à Keyhouse, la maison ancestrale de la famille suite au violent meurtre du père. Chaque membre doit faire son deuil et trouver sa place dans ce nouvel environnement. Très vite, les enfants découvrent que la demeure possède de nombreux secrets, dont des clés magiques avec d’incroyables pouvoirs, comme celle de donner des ailes, d’effacer des souvenirs ou de transformer en fantôme. Ces clés sont convoitées par Dodge, une créature démoniaque qui est prête à tout pour atteindre ses objectifs.

Composée de 37 numéros regroupés en 6 recueils qui ont été publiés en France chez Milady Graphics, Locke & Key est une œuvre hantée par le passé, les traumatismes et le deuil, proposant d’explorer ses thématiques en délivrant toujours plus de morts et de destruction. C’est simple : la reconstruction pour la famille Locke passe par la souffrance. Chaque membre doit se redéfinir suite à la perte de la figure paternelle, pilier de la famille. Les riches dessins de Rodriguez soutiennent alors une ambiance qui vacille entre le drame humain, l’humour du quotidien et l’horreur fantastique.

La mère, Nina Locke, est une femme qui est autant abimée physiquement que psychologiquement, noyant son malheur dans l’alcool. Celle qui devrait donc aider sa famille dans cette épreuve n’en est pas apte, et les évènements qu’elle a traversée n’ont fait qu’amplifier les troubles qui l’habitait déjà. Joe Hill et Gabriel Rodriguez oriente leur récit autour des enfants Locke, chacun appréhendant la tragédie et les découvertes des clés de façon différente. Les jeunes Locke agissent de manière parfois naïve, souvent irresponsable ou imprudente, tandis qu’ils apprennent progressivement à faire face à ce qu’ils ont vécu pour pouvoir mieux affronter ce qui les attendent. Le benjamin de la fratrie, Bode représente l’innocence. Imaginatif et dissipé, il est celui qui découvre les clés et qui expérimente avec insouciance les possibilités qu’elles offrent. Sa soeur Kinsey évolue au fil des numéros, avec des changements esthétiques dans une recherche de fuite émotionnelle et de reconquête identitaire. Son univers brisé, Kinsey doit redonner du sens à qui elle est.

Si Locke & Key se construit autour de la famille Locke, nous offrant un ensemble solide qui peut explorer les sujets qui l’occupent à travers différents angles, reste qu’en bout de route, le récti est avant tout l’évolution de Tyler Locke, d’adolescent immature consumé par un sentiment de culpabilité à jeune adulte responsable, homme de la famille et gardien des clés (et par extension, protecteur de l’héritage familial), sur qui ses proches peuvent toujours compter.

Le point de départ de Locke & Key est naturellement annonciateur d’une noirceur évidente, et le comics ne manquera pas une occasion pour jongler entre ses éléments familiaux et horrifiques pour offrir un récit aussi enthousiasmant que captivant. Dans un tel contexte, Dodge profite de l’état fragile des Locke pour s’insinuer dans leur vie et les manipuler. Ce dernier représente ainsi une forme de mal qui ronge la famille depuis maintenant bien longtemps et qu’il est nécessaire de détruire pour pouvoir reprendre le contrôle. Pour cela, encore faut-il avoir conscience de son existence, ce qui aide alors à Locke & Key à s’arrêter plus en détails sur ce qui permet de survivre aux épreuves et d’en ressortir plus fort. C’est en explorant et en apprenant à vivre avec le passé que les Locke peuvent trouver leur véritable place dans le présent.

En conséquence, la violence s’invite plus que de raison dans la vie de la famille Locke, et les clés ouvrant la porte vers un univers magique apportent aussi le danger dans leur quotidien et n’offrent qu’à de rares occasions de véritables solutions à leurs problèmes. Les clés sont alors souvent utiliser pour mieux illustrer les épreuves que traversent les différents membres Locke et leur état psychologique, que cela soit bon ou non pour eux. De la représentation de la mythologie Lovecraftienne à l’hommage Calvin & Hobbes, le dessin de Rodriguez fait par ailleurs des merveilles, délivrant plus d’un plan iconique, à commencer naturellement par celui qui nous révèle ce qui se trouve dans la tête de Bode.


Locke & Key est une oeuvre a su se démarquer en exploitant avec ingéniosité ses clés magiques, développant une palette de personnages riches et complexes, multipliant les thématiques sociales, les dilemmes moraux et les épreuves psychologiques. Elle construit un univers tangible où la magie (et le danger qui va avec) trouve une place naturelle, servie par des dessins qui donnent merveilleusement vie à la famille Locke et sa maison ancestrale. Entre une horreur lovecraftienne, humour et sensibilité, Locke & Key fait partie de ces lectures qui laisse son empreinte.

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