Au cœur de l’excellente série Bates Motel se trouve la relation particulière entre Norma et Norman. Si la série se veut être un sorte de préquelle au classique Psychose pour nous montrer la montée en puissance de l’un des psychopathes de fiction les plus connus, elle explore également un personnage constamment présent dans le film mais qu’on ne connaît pas.
Attention, contient des spoilers sur les 4 saisons diffusées.
L’introduction à Norma Bates
La Norma Bates du roman de Robert Bloch et du film d’Alfred Hitchcock est présentée comme une mère tyrannique et tellement possessive qu’elle lui met en tête que toutes autres femmes qu’elles ne sont que des suppôts de Satan. La Norma Louise Bates qui débarque à Pine View pour racheter un motel au début de Bates Motel ne semble pas être bien loin de l’originale.
En plus de ne pas supporter les adolescentes qui rôdent autour de son fils chéri, Norma le mène à la baguette tout en entretenant une relation plus qu’ambiguë avec lui. Elle fait aussi montre d’une détermination glaciale pour obtenir ce qu’elle veut et n’hésite pas à utiliser ses atouts physiques pour arriver à ses fins avec la gent masculine. Autre facette de sa personnalité peu avenante, le peu d’amour maternel qu’elle porte à Dylan, son fils aîné, et qui est d’autant plus choquant qu’il contraste avec son comportement envers Norman.
Aux débuts de Bates Motel, et tout particulièrement dans la saison 1, Norma nous est montrée comme une femme assez détestable alors que Norman est dépeint comme un adolescent sympathique.
Au fur et à mesure que les saisons passent, le tempérament psychotique du fils va se révéler et venir contrebalancer l’antipathie de la mère pour qu’elle devienne finalement une personne attendrissante, drôle et amoureuse.
Un lourd passé
Il faut dire aussi que Bates Motel nous révèle au fil du temps le passé de Norma pour nous aider à mieux comprendre comment elle est devenue la femme qu’elle est aujourd’hui.
Il est évident rapidement qu’elle a été quasiment toute sa vie confrontée à la violence des hommes. Son père était un alcoolique qui la battait. Celui de Norman était également violent et abusait d’elle. Dans le pilote de la série, elle se fait agresser par l’ancien propriétaire du motel. Une succession d’hommes qui ne font que la décevoir à l’exception de Norman, le seul finalement qui se tient à ses côtés et l’aime vraiment.
C’est encore plus compliqué avec Dylan, dont le père n’est autre que Caleb, le frère de Norma. Fruit d’un viol incestueux, elle n’a jamais pu véritablement aimer son aîné et celui-ci a toujours ressenti ce manque, mais aussi la jalousie envers son petit frère tant choyé.
Judicieusement, les scénaristes ne se sont pas contentés de la bombe que représentait la découverte de l’origine de Dylan. La relation de Norma avec son frère est bien plus ambigüe, avec une relation particulière qui leur a permis durant leur enfance de survivre à la maltraitance de leur père. Un mélange d’amour et de haine qui explique également le rapport qu’elle entretient avec Norman, le peu de retenue qu’elle peut avoir et qui donne l’impression de se trouver à la limite de l’inceste.
La responsabilité de la folie de son fils
Norma n’est pas la femme la plus équilibrée qui soit. Cela mène évidemment à se questionner sur l’impact que son comportement et l’éducation qu’elle fournit à son fils a sur les problèmes qu’il rencontre et le conduiront à devenir cette figure mythique de Psychose.
Ce n’est pas tant dans le prénom qu’elle lui a donné, puisqu’elle explique clairement que nommer un garçon d’après son père n’a jamais dérangé personne.
Bien sûr, dans cette relation toujours à la limite du malsain, on peut apercevoir les “origines du mal”. On découvre d’ailleurs en fin de saison 3 et tout au long de la quatrième que Norman se prend pour sa mère dès qu’il a une « absence ». Il est alors persuadé que Norma perpètre les meurtres qu’il commet.
Évidemment, la série ne se place pas en spécialiste de la psychologie pour une maladie dont on ne sait pas si elle est génétique ou influencée par l’environnement. En revanche, une chose est sûre : si Norma avait moins protégé son rejeton, si elle avait accepté de voir ses problèmes, elle aurait peut être pu le faire soigner plus tôt et éviter l’inévitable.
Talent d’actrice
La Norma Bates du petit écran marque tant les esprits grâce à l’interprétation impeccable de Vera Farmiga, actrice de talent qui ajoute une couche de complexité à un personnage qu’il l’est déjà beaucoup. Elle peut ainsi mener autant à la haine qu’à l’adoration dans une même scène et son charme vintage participe à nous donner l’impression qu’elle est hors du temps.
Si l’on salue souvent le travail de Freddie Highmore dans la peau de Norman, Bates Motel ne serait rien sans l’alchimie palpable qui existe entre la mère et le fils, entre les deux acteurs.
Il est d’ailleurs amusant de noter que Vera Farmiga a avoué qu’elle n’était pas très emballée par Bates Motel ; elle a finalement accepté en voyant les essais effectués par Highmore et a décidé de considérer le thème de la série comme étant celui d’une relation mère-fils.
Norma par Norman
On savait bien que la mort de Norma Bates finirait par arriver ! Cela fait partie intégrante de l’histoire, un évènement connu qui participait à créer une certaine dose de tension supplémentaire.
On savait donc depuis la saison 1 que Norman finirait par s’en prendre à sa mère et on nous y a même préparé avec sa passion tout ce qu’il y a de plus innocent pour la taxidermie…
Si ce passage à l’acte était nécessaire pour l’évolution de Norman, sa mère était tellement présente et indispensable qu’il était difficile d’imaginer comment la série pourrait se passer d’elle. D’ailleurs, Norman ne l’empoisonne pas de rage comme dans l’oeuvre originale, il décide de mettre fin à leurs deux vies, mais seule sa mère succombe.
Maintenant qu’elle est bel et bien morte, j’ai hâte de voir ce que va donner la série.
Qu’on ne s’y trompe pas, vivante ou morte, Norma sera toujours présente dans l’esprit de son fils. Dès lors, on ne la verra plus qu’à travers le spectre de la folie de celui-ci. Un spectre qui, avec du recul, alors que la caméra a essayé de nous tromper à plusieurs reprises, nous fait douter de la véracité de pas mal de scènes vues dans les saisons précédentes.
Tout l’intérêt de proposer un préquel à l’histoire de Norman Bates était de pouvoir faire la connaissance de Norma, d’apprendre à la connaître, à l’apprécier, à la haïr et à comprendre dans quelle mesure elle aura façonné la folie de son fils.
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Si le Norman de la série suit les traces de son illustre prédécesseur, Bates Motel aura permis à sa mère de forger sa propre légende et d’être bien plus qu’un souvenir un peu trop encombrant.
La saison 5 nous proposera donc un nouveau tournant, aussi bien pour la vie de Norman qui n’a plus aucun garde-fou, que pour la construction du mythe de Norma qui peut maintenant allègrement survivre au personnage en lui-même.