Alors que la 2e saison vient de se conclure au printemps sur la chaine américaine BET, revenons sur cette série créée par Mara Brock Akil, peu connue outre-Atlantique, qui mérite pourtant que l’on s’y intéresse.
Being Mary Jane met en scène Gabrielle Union dans le rôle de Mary Jane Paul, de son vrai nom Pauletta Patterson, une présentatrice afro-américaine de talk-show, dans la trentaine, qui a priorisé sa carrière au détriment de sa vie personnelle et qui s’aperçoit que la recherche du bonheur n’est pas si simple. Ainsi si tous les indicateurs sociaux économiques – maison, voiture, tenues — font de Mary Jane une femme qui a réussi professionnellement, la série s’emploie au fur et à mesure des épisodes à nous montrer l’envers du décor, le vide qui au fil des années a rempli son existence. Et notamment, sa vie sentimentale qui se révèle catastrophique.
On nous entraine alors, entre rire et larmes, dans le quotidien de cette célibataire en mal d’amour et de maternité. Des situations d’une déroutante réalité s’enchainent où les amitiés, les relations amoureuses et les relations avec sa famille sont mises à mal pour le meilleur et pour le pire. Le constat dressé pendant ces deux saisons est sans concession pour notre héroïne qui s’aperçoit de sa propre hypocrisie. C’est alors relativement déconcertant de la voir malmenée ainsi, mais cela permet un rapprochement plus que salutaire après les décisions drastiques des derniers épisodes. Tout au long de ces deux saisons, Gabrielle Union se met à nu pour interpréter son personnage et nous offre de grands moments. Pour autant, comme toute série ne se reposant principalement que sur un rôle central, l’actrice se révèle être autant une force qu’un handicap pour Being Mary Jane. Comme d’autres avant elle, on l’adore ou elle laisse indifférente dans le meilleur des cas, faisant de ce show un coup de cœur ou non.
Si la série a su dépeindre avec précision Mary Jane en nous immergeant littéralement dans son quotidien, Being Mary Jane apporte également de bons développements aux nombreux seconds rôles, notamment lors de la seconde saison composée de 12 épisodes. Tout d’abord avec Kara Lynch, interprétée par Lisa Vidal, l’assistante de production et amie de longue date de Mary Jane. Si la vie personnelle de cette dernière apparait tout aussi catastrophique que son amie, c’est surtout avec ses prises de position différentes en terme de racisme que son personnage prendra du relief. Puis les rôles masculins avec David Paulk (Stephen Bishop), ancien amant de Mary Jane qui hante toujours son cœur, Andre Daniels (Omari Hardwick) intérêt amoureux en 1re saison ou encore Gary Dourdan dans le rôle d’un séducteur aux mœurs inhabituelles.
Quant à la famille de Mary Jane, elle s’éloigne rapidement des clichés habituels pour offrir l’image d’une famille bourgeoise au bord du gouffre. Un père fier de ses années de travail qui ont permis à ses enfants de s’élever dans la société ; une mère froide et acariâtre atteinte de lupus depuis des années ; le fils aîné alcoolique divorcé, père de 3 enfants, qui a tout perdu ; l’une de ses filles, mère adolescente ; et le benjamin, étudiant à l’université qui revend de la drogue pour se faire un petit pécule. Tout ce petit monde semble tenir en place grâce à Mary Jane et à son inépuisable capacité à sortir son chéquier, mais comme les évènements qui vont se dérouler pendant ces 20 épisodes, rien n’est jamais aussi simple dans une famille. Les déboires de certains vont avoir des conséquences dans la vie de notre héroïne, impactant le fragile équilibre qu’elle avait instauré et en mettant en exergue certains traits de sa personnalité qu’elle aurait préféré cacher.
À l’instar d’autres shows sur le journalisme, pour grimer la réalité, Being Mary Jane s’emploie à utiliser des évènements d’actualité afin d’illustrer les propos tenus par notre héroïne. Mary Jane dans son émission s’évertue donc à parler de sujets sensibles et surtout de la place des Afro-américains dans la société, amenant plus d’un épisode à jouer sur la ligne entre fiction et réalité. Lorsque la série prend un tournant décisif en décidant d’aborder de manière plus frontale le racisme, elle le fait en invitant de vrais activistes (Michaela Angela Davis, India Arie et Mark Anthony Neal) pour passer un message clair et sensé. Cette volonté de se concentrer sur une partie de la population en ne soulevant que les problèmes de société qui en découlent pourrait toutefois, à la longue, en rebuter certains.
Outre ses messages politiques ciblés, le show n’est pas avare de bons dialogues et profite d’une lubie de son héroïne pour nous faire philosopher avec, en chaque début d’opus, une citation célèbre qui caractérise la situation dans laquelle se trouve Mary Jane. Si le concept est assez commun, la réalisation originale en fait un atout scénaristique qui nous conditionne pour le scénario à venir.
Being Mary Jane se révèle donc une série intéressante avec une héroïne haute en couleur qui, en dépit de ses défauts, sait se montrer attachante. Les seconds rôles se fondent à merveille dans la vie de Mary Jane et deviennent progressivement une part entière de l’histoire. Quant au dernier épisode diffusé, le cliffhanger proposé ne peut que nous inciter à revenir l’année prochaine, la série ayant été reconduite malgré une baisse des audiences, si tentés que l’on apprécie Gabrielle Union.