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Séries BH90210 Saison 1 : Quand le reboot devient satirique (sur TF1)

BH90210 Saison 1 : Quand le reboot devient satirique (sur TF1)

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BH90210 Saison 1 - BH90210 Saison 1 : Quand le reboot devient satirique (sur TF1)

L’exercice du reboot/remake/retour est périlleux. Nombreux s’y sont essayés et s’y sont cassés plus ou moins les dents (Prison Break, Heroes, The X-Files) là où d’autres, plus rares, ont réussi ce passage (One Day At A Time, Will And Grace). Ce n’est ni une nouveauté ni une exception si l’on considère le genre dont on parle (la série télévisée, cyclique par essence), nous sommes seulement dans une époque où les moyens sont propices à cela et où la nostalgie bat son plein.

Ce n’était donc qu’une question que de temps avant que Beverly Hills 90210 s’y frotte. Sa sœur Melrose Place s’y est piquée jusqu’à être annulée à juste titre au bout d’une petite saison, sort que je n’espère pas ici tant ce que la nouvelle version montrant un faux reboot avec les vrais acteurs jouant de faux eux-mêmes (oui, il faut suivre) m’a plu.

BH90210 démarre sous l’impulsion de Tori Spelling, épaulée par Jennie Garth, autant dans la réalité (elles sont à l’origine du projet de la série que nous avons sous les yeux) que dans la fiction (elles sont également celles qui vont réunir le casting et vouloir un retour de la série). Ce double discours méta va être un des fils rouges de la série, à mesure que les stars vivent sous nos yeux un possible retour de gloire ancienne. La série est alors un moyen pour tous les personnages de faire le point sur leur vie et sur l’industrie, en épargnant ni grand monde, ni grand-chose.

Un des points les plus intéressants des six épisodes qui composent cette première saison est la distance ironique qu’ils prennent par rapport à eux-mêmes. Si le contenu de la série (la fausse) n’est pas réellement développé, le retour sur les lieux du tournage, les forçant à faire face aux vieilles dynamiques, impose un humour souvent bien calibré, mais également une vérité par rapport à ce qui est raconté et sur qui cela est raconté. Les créatrices ne sont pas spécialement tendres avec Jason Priestley ou Ian Ziering par exemple, en faisant d’eux des opportunistes qui ne voient en ce retour qu’une occasion de développer leurs propres petites ambitions.

Pour leur défense, Spelling et Garth sont tendres avec personne, mais elles ne sont jamais méchantes. La première a de gros soucis d’argent quand la seconde cache son énième divorce au monde. Elles apparaissent elles-mêmes comme des divas souvent déconnectées de la réalité ou faisant un peu trop de zèle, mais savent émouvoir (voire tirer une larme dans le second épisode pour Tori) quand il s’agit de faire le point sur une carrière en déclin, le poids de l’industrie télévisuelle sur leur vie personnelle et donc les dégâts que cela a toujours sur elles. Ce reboot est alors présenté comme une revanche, ce n’est pas Brian Austin Green qui dirait le contraire, étant devenu l’ombre de lui-même (et de sa femme).

C’est un destin qui semble épargner deux personnages : Gabrielle Carteris et Shannen Doherty. Elles sont celles que les filles, suite à la convention de fans de Las Vegas qui réunit le casting et leur donne l’idée du reboot, peinent à faire revenir. Gabrielle aime sa vie, mais il lui faut simplement faire le point sur elle-même pour qu’elle se rende compte que c’est une chose dont elle a besoin. Elle gère mal le fait de vieillir et une bisexualité qui va devenir son moteur pour que son personnage revive. C’est peut-être une des parties les plus intéressantes de la saison, permettant d’adresser la manière dont la série des années 90 a occulté des représentations qui ne peuvent plus ne pas exister aujourd’hui. De son côté, Shannen est la caution humour, étant devenue une hippie en marge du star-system et qui fait son retour juste pour aider. Il faudrait que la seconde saison (s’il y en a une) épaississe un peu son rôle au sein du groupe pour qu’il ne paraisse pas uniquement pour le comic relief.

Il y a donc un message vraiment intelligent autour de l’industrie et comment celle-ci aliène ses pions, notamment dans une époque qui surfe sur la nostalgie plutôt que d’en prendre soin. Tous les producteurs, la presse, les relations publiques, les chaînes et les fans sont une machine à broyer pour les acteurs (ce que veut empêcher Jennie à sa fille) et ils cherchent ici une seconde chance pour mieux faire avec plus de cartes en main. Cela devient alors également un hymne à l’entraide et à l’amitié, chacun retrouvant dans le casting un sentiment d’appartenance et d’affection qui leur avait manqué. C’est là où BH90210 trouve sa portée émotionnelle et étonne parce qu’au-delà de l’intelligence de son format, elle a un cœur.

Pour être un retour parfait, il aurait cependant fallu qu’elle soit plus constante et moins éparpillée dans tout ce qu’elle veut dire et faire. L’intention est excellente, mais le mélange des genres auquel elle s’essaie est beaucoup trop anecdotique pour que cela fonctionne. Ainsi, l’intrigue du harceleur qu’ils subissent tous paraît un surplus non nécessaire tant il n’est jamais correctement adressé. De plus, les personnages gravitant autour du casting original ne sont pas assez développés dans leur segment pour marquer par rapport à tout ce qui est raconté quand les acteurs sont ensemble. Cela apporte une cohérence aux problèmes auxquels ils font face, mais nous n’avons que faire du destin des seconds couteaux pour le moment.

BH90210 a su jouer avec l’exercice du reboot avec une acuité assez rare et démontre sans prétention qu’elle sait ce qu’elle veut raconter et qu’elle peut le faire de manière plus pertinente que beaucoup de ses consœurs qui s’y sont essayées. Nous aussi, on veut retourner une nouvelle fois au Peach Pit, mais cela ne se produira pas, puisque la série a été annulée par la chaine américaine FOX.


Publié en septembre 2019, cet article est remis en avant à l’occasion de la diffusion de cette saison 1 de BH90210 en France sur TF1 dès ce mercredi 29 juillet à partir de 21h05.

 

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