Après Dirty John qui adaptait un podcast revenant sur un fait divers criminel, le genre continue de s’étendre dans la bonne direction avec maintenant Dr. Death qui, à son tour, se base sur un podcast explorant un terrible fait divers.
Série Peacock diffusée en France sur StarzPlay, Dr. Death nous propose de découvrir la terrifiante histoire du Dr Christopher Duntsch (Joshua Jackson), une star montante et meurtrière de la communauté médicale de Dallas au Texas. Alors qu’il laisse derrière lui un nombre croissant de victimes, mortes et mutilés, les docteurs Robert Henderson (Alec Baldwin) et Randall Kirby (Christian Slater) s’allient dans le but de le stopper.
Développée par Patrick Macmanus, Dr. Death nous retrace le parcours « glorieux » de Christopher Duntsch en parallèle des efforts des docteurs Henderson et Kirby, accompagnée ensuite par l’assistante du procureur de Dallas, Michelle Shughart (AnnaSophia Robb) pour l’arrêter. Une narration non linéaire a donc été choisie pour dynamiser le récit, et nous introduire dès le départ les docteurs destinés à jouer un rôle majeur dans la chute de Duntsch.
Ce judicieux choix permet naturellement de faire connaissance avec Henderson et Kirby dès le premier épisode et de faire rapidement monter les enjeux. C’est une bonne manière de créer du suspense et la saison en elle-même exploitera régulièrement sa ligne temporelle en jouant à l’aide d’allusions à des évènements qui seront explicités plus tard. Qui plus est, cela évite d’être continuellement en présence de Christopher Duntsch, qui est, sans surprise, un homme qui met aisément mal à l’aise, tout en usant de tous ses charmes pour séduire les patients.
Se composant de huit épisodes, Dr. Death s’articule également autour d’une question clé : Duntsch a-t-il mutilé et tué ses patients volontairement ou était-il un chirurgien incompétent ? Naturellement, Patrick Macmanus a son opinion sur la question, et la série tend d’ailleurs vers cette conclusion tout en ne l’embrassant pas pleinement et laissant la place à l’interprétation. Personne, à part Duntsch, n’a la réponse à cette question, et c’est un fait que la série prend pleinement en compte.
Qui plus est, cela participe à créer une forme d’anxiété qui grimpe tout au long du visionnage. Sous les traits de Joshua Jackson, Duntsch se présente à nous comme un homme déterminé et charismatique qui dissimule sa sociopathie. D’une certaine manière, on voit le schéma se répéter à de multiples reprises, mais cette répétition sert le propos. Les patients s’enchainent, Duntsch se célèbre et impute les erreurs aux autres et recommence. Encore et encore. Plus on avance dans la saison, et plus il est terrifiant de le voir entrer dans une salle d’opération avec une telle arrogance alors que l’on sait pertinemment que l’échec est au bout du couloir.
Les figures qui l’entourent viennent affiner le portrait d’un chirurgien sociopathe, entre la mère de son enfant (Molly Griggs) qui n’est pas aveugle à quel genre d’homme elle a réellement affaire, son meilleur ami Jerry (Dominic Burgess) qui l’idolâtre et en paiera le prix fort, ou encore son père (Fred Lehne) qui reste aux côtés de son fils jusqu’au bout malgré tout. Surtout, Kim Morgan (Grace Gummer), qui aura eu une courte liaison avec Duntsch alors qu’elle travaillait pour lui, vient nous offrir la vision d’une femme qui a rencontré Christopher, a été séduite, puis a vu le voile se lever devant ses yeux avec horreur, en ressortant tout simplement terrifiée. Et il y a de quoi être terrifié à l’idée que quelqu’un comme Christopher Duntsch existe et puisse légalement opérer.
Il va de soi, plus Dr. Death s’enfonce dans son sujet, et plus les dérives du système et de la société qui aura permis à Duntsch d’entrer dans un bloc opératoire ressortent. Il est tout simplement impossible de traiter le sujet sans écorcher vif tout le système médical administratif du Texas — et il va de soi que le point fait va au-delà de cet état.
Reste que si Dr. Death nous offre un portrait angoissant du chirurgien, ce n’est pas ce qui fait pleinement battre le cœur de la série. Cette dernière prend définitivement forme auprès de Kirby, Henderson et Shughart. Voir le duo de chirurgiens aux personnalités bien distinctes s’associer, se frotter aux institutions et aux limites de la loi dans le but de mettre un terme aux activités de Duntsch est sincèrement fascinant. Ils passent par différents stades, entre les petites victoires et les échecs, les recherches pour trouver des preuves et découvrir aux côtés de l’assistante du procureur comment naviguer la loi pour arriver au but recherché.
Le trio représente la lumière du phare dans la nuit dans une série qui dépeint ce que le milieu médical peut faire de pire. Ils représentent ceux qui tentent, coûte que coûte, de se battre pour le bien du patient. Le médecin reste un être humain qui va commettre des erreurs et cela peut coûter la vie. C’est un fait qui ne peut être ignoré, par le patient et le soignant, mais la nature profonde même de celui qui tient le bistouri compte plus que tout.
Dr. Death réussit alors un joli tour de force en offrant une série médicale pas comme les autres qui vient explorer la noirceur de la profession à l’aide d’un chirurgien meurtrier et de deux collègues prêts à tout pour arrêter le massacre. Plus on avance et plus l’horreur est frappante, révélant la boucherie qu’aura faite Duntsch mais aussi le fait qu’il aurait pu être stoppé bien plus tôt. Aussi fascinant que terrifiant et déchirant jusqu’à ses derniers mots à l’écran.