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En saison 2, Fargo revient dans le passé pour trouver sa voix

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Fargo Saison 2 - En saison 2, Fargo revient dans le passé pour trouver sa voix

La définition d’anthologie à la télévision s’est beaucoup élargie ces dernières années. Elle est maintenant principalement utilisée pour parler d’une série qui change de décors chaque saison pour raconter une histoire différente, mais pas nécessairement indépendante. Du moins, c’est clairement de cette manière que l’on peut caractériser l’approche créative de Fargo. La vérité étant que la dénomination est aujourd’hui plus liée à la catégorie dans laquelle le show va être introduit aux Emmy Awards.

L’intrigue de cette seconde saison de Fargo n’est donc aucunement indépendante de celle de la première. Elle se passe juste des années auparavant. Nous nous retrouvons ainsi du côté de Luverne en mars 1979. Ronald Reagan (joué par Bruce Campbell) est en pleine campagne électorale. Lou Solverson (Patrick Wilson) est State Trooper et Molly n’a que 6 ans. L’histoire débute avec un petit criminel pas très futé et nous mènera au fameux massacre à Sioux Falls qui avait été évoqué en saison 1. Entre les deux, il y a beaucoup de morts, de la confusion et un peu de neige.

Au premier abord, le plus grand challenge que Noah Hawley avait avec Fargo était de redonner vie à l’univers des frères Coen. En réalité, le plus difficile était de répéter l’opération. C’est surement pour cela qu’il a clairement décidé dans sa seconde saison d’affirmer sa voix plus fortement au-dessus de celle des célèbres cinéastes. Il ne les oublie pas, s’inspirant toujours de leurs films – ici Miller’s Crossing et The Man Who Wasn’t There lui ont donné des idées –, mais le ton, les dynamiques et même la structure générale s’émancipent de ce qui avait servi de modèle pour la série à l’origine.

Plus cynique et bien moins ironique ; plus linéaire et moins spontanée ; cette saison 2 de Fargo a sa propre saveur et s’affirme clairement comme étant quelque chose de différent. Dans ce sens, c’est probablement à ce niveau que la série mérite d’être qualifiée d’anthologie, car si les références à la saison 1 et aux Coen sont là, c’est un show à part qui nous est présenté.

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Tout débute donc alors que Molly n’était pas en âge de pourchasser les criminels. C’est son père et son grand-père (Ted Danson) qui s’en chargeaient. Tous les deux sont des vétérans. Étant revenus de leurs guerres, ils n’étaient aucunement intéressés par en revivre une autre chez eux. Pourtant quand la famille criminelle dirigée par les Gerhardt refuse de céder ses opérations au syndicat du crime de Kansas City, les cadavres commencent à tomber et Lou Solverson hérite d’un autre conflit meurtrier qui n’a aucun sens.

Exploitant à plusieurs reprises le contexte géopolitique de l’époque qui permit à Reagan d’arriver au pouvoir, cette saison 2 de Fargo affirme sa voix en faisant écho à celle d’un pays qui s’est égaré. La période était difficile pour tout le monde et la guerre entre les Gerhardt et la mafia de Kansas City est celle de son temps. Les opérations familiales mouraient au profit des corporations sans visage. Le capitalisme rampant des années 80 se profilait à l’horizon et Noah Hawley en a fait son moteur narratif.

Il était donc question de changements. Ceux-ci étaient violents par nécessité – selon les points de vue. Au milieu se trouvait la famille américaine : Peggy (Kirsten Dunst) et Ed Blumquist (Jesse Plemons). Comme Lester Nygaard (Martin Freeman) en saison 1, les Blumquist apparaissent dans un premier temps comme étant des dommages collatéraux. En réalité, ils sont l’étincelle qui provoqua l’incendie dévastateur que Lou Solverson chercha à stopper du premier au dernier épisode de cette seconde saison.

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Lou est en effet à la traine. Il court après tout le monde et, quand il parvient à prendre les devants, il est incapable d’empêcher l’inévitable. Son impuissance à mettre un terme au carnage transpire à l’écran, nous encourageant à n’être que des spectateurs impuissants face à ces criminels qui s’entretuent. Hawley a beau avoir un talent certain pour créer des personnages – et sa directrice de casting, Rachel Tenner, fait des miracles pour trouver les bons acteurs –, ils laissent ceux avec lesquels il est le plus aisé de s’investir en arrière-plan.

Ainsi, connecter avec les Solverson qui sont touchés par la folie de ce monde extérieur et la maladie qui ronge de l’intérieur Betsy (Cristin Milioti), la mère de Molly, est ce qu’il y a de plus naturel. À l’opposé, s’intéresser au sort des Gerhardt demande un peu plus de travail et n’aboutit pas réellement sur quelque chose de substantiel. Cette famille n’est qu’un symbole et le seul mérite de la mafia de Kansas City est que son homme de main Mike Milligan (Bokeem Woodbine) offre un visage sympathique qui lui permet de ne pas être qu’une excuse pour toute cette débandade.

En fait, Mike pourrait presque réclamer le titre de héros de toute cette histoire. Il est cet américain moyen qui veut grimper les échelons. Il est à la recherche de son rêve américain et a de véritables aspirations. Dans ce sens, il ressemble à Ed Blumquist, mais celui-ci était comme The Barber, trop invisible pour que l’on y prête réellement attention. Lui et Peggy s’imposent comme des interférences qui doivent attendre le huitième épisode pour devenir des personnages à part entière dignes de l’univers de Fargo.

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Noah Hawley a donc voulu raconter une histoire qui était vraiment sienne avec cette seconde saison. Il n’arrive pas à le faire pleinement, soignant trop les détails au détriment de l’image globale que son intrigue nous peignait, mais cela est tout de même payant.

Cette guerre entre les Gerhardt et Kansas City ne sera jamais aussi intéressante qu’elle aurait pu l’être. Malgré tout, elle fournit ce qu’il fallait pour que prennent place toutes ces scènes qui, séparément, sont simplement brillantes. Il est dommage que tant paraissent ne servir qu’à compenser les carences de l’histoire principale. Ainsi, cette saison 2 de Fargo est inférieure à la somme de ses parties, car une bonne majorité des épisodes possède un niveau supérieur quand on les prend individuellement. On y trouve des acteurs délivrant des performances mémorables, des dialogues qui marquent, une bande-son terriblement efficace (et bourrée de covers improbables) et un montage très soigné.

En tant qu’anthologie, Fargo suit définitivement la bonne voie et ne déçoit pas. Cette saison 2 confirme que la réussite de la première n’était pas un accident et qu’il était possible de faire différent afin de mieux caractériser l’univers de la série, sans perdre ce qui le faisait fonctionner au premier abord.

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