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Séries L’amie prodigieuse Saison 1 : De la question d’une bonne adaptation (sur France 2)

L’amie prodigieuse Saison 1 : De la question d’une bonne adaptation (sur France 2)

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Lamie prodigieuse Saison 1 - L'amie prodigieuse Saison 1 : De la question d’une bonne adaptation (sur France 2)

Qu’est-ce qui fait une bonne adaptation ? La question possède une valeur quasi philosophique, qui se pose après chaque nouvelle adaptation d’un livre en série. Est-ce que les auteurs doivent rester fidèles à la source originelle ? Doivent-ils au contraire s’en démarquer le plus possible pour faire entendre leur voix ? Un peu des deux ?

Bien évidemment, la réponse que vous apporterez à cette question sera influencée par vos expériences personnelles, ainsi que votre propre vision des choses. En cela, L’amie prodigieuse représente un cas d’étude assez fascinant sur ce que signifie adapter une œuvre.

L’amie prodigieuse est une série de livres écrits par Elena Ferrante, sur l’amitié contrariée de deux jeunes filles, Elena « Lenù » Greco et Raffaella « Lila » Cerrullo, dans le Naples et l’Italie en pleins bouleversements des années 50. La saga comporte quatre livres qui racontent l’histoire de ces deux personnages, de l’enfance à la vieillesse, avec toujours en toile de fond, un paysage en continuelle transformation.

Cette première saison se révèle extrêmement littérale dans son adaptation du premier tome de la saga. On suit donc les aventures de Lenù et Lila dans leur quartier, de l’enfance à l’adolescence. Le fait que Laura Paolucci et Francesco Piccolo, les créateurs de la série, suivent si scrupuleusement le livre peut s’avérer frustrant pour celles et ceux qui l’auraient lu. En effet, rien de nouveau ou presque n’est intégré au récit.

Néanmoins, l’avantage d’une adaptation sérielle sur un livre se trouve dans le fait qu’elle permet de faire sortir nos imaginaires collectifs de notre esprit ; en cela, la réalisation et la photographie de la série sont deux de ses gros points forts. On a vraiment le droit à des plans magnifiques, surtout lorsque la série quitte le quartier de Naples pour aller à Ischia, suivant l’évolution de Lenù.

La douceur des plans et des images contraste extrêmement bien avec la violence larvée que nous raconte Elena Ferrante. Les scènes de danse, la fameuse scène des batailles de feux d’artifice… il se dégage une véritable poésie de ces images, quelque chose qu’il était impossible de réellement se représenter en lisant le livre.

Cependant, les images n’auraient pas été aussi fortes sans une bande-son de qualité. On arrive ainsi à mon grand coup de cœur de cette saison : au-delà des quelques musiques d’époque qui illustrent parfaitement l’ère du temps, la bande-son accompagne de très belle manière les moments très doux, comme les moments plus violents. Si vous êtes amateurs de piano et de violon, vous allez adorer la bande-son, qui vous rappellera The Leftovers – la bande-son ayant été réalisée par Max Richter, qui s’était occupée de cette dernière.

L’amie prodigieuse se montre résolument contemplative, et ce, malgré les explosions de violence disséminées çà et là. Le rythme est assez lent, mais beaucoup de dialogues passent par les regards des personnages. Le casting est par ailleurs vraiment très bon. Les deux premiers épisodes se passent en effet durant la petite enfance de Lenù et Lila, et les deux jeunes actrices sont excellentes. Surtout celle jouant Lila qui porte le début de la série sur ses épaules, incarnant parfaitement le feu qui réside dans la jeune enfant, une force brute qui ne veut pas de compromis.

C’est par ailleurs totalement personnel, mais je trouve que le casting a fait de très bons choix d’acteurs et d’actrices. Il est toujours difficile de répondre aux attentes des fans des livres pour une adaptation en série — il n’y a qu’à voir les polémiques sur l’adaptation prochaine de The Witcher par Netflix — mais c’est tout à fait comme cela que j’imaginais Lenù et Lila.

Cette première saison raconte donc principalement l’adolescence de nos deux héroïnes, mais elle ne laisse pas de côté les thèmes profondément féministes développés dans le livre. C’est une histoire d’amour et de rivalité entre deux jeunes femmes qui rêvent de s’émanciper de leur quartier d’origine, d’être plus que ce que leur condition — jeunes femmes de quartier populaire — leur prédestine. Découverte de l’amour et de la cruauté du monde, les petits plaisirs de la vie et ses dures contraintes, L’amie prodigieuse baigne dans un climat assez calme, tout en étant toujours très proche de l’explosion.

Au sein de ces huit premiers épisodes — la série ayant une saison 2 —, les connaisseurs des livres pourront donc voir les quelques scènes iconiques du premier tome, les novices profiteront d’une histoire bien maîtrisée, saupoudrée de quelques excellents épisodes.

En définitive, L’amie prodigieuse délivre une première saison de très bonne facture, dont le seul réel défaut est sans doute d’adapter trop fidèlement le livre, résultant en quelques problèmes de rythme. Au-delà de cela néanmoins, on a là une première saison très prometteuse et qui donne envie de voir ce qui va se passer après le cliffhanger de fin.


Un air de déjà vu ? Ce bilan a déjà été publié en janvier 2019 et il est aujourd’hui remis en avant à l’occasion de la diffusion de cette saison 1 de L’amie Prodigieuse qui a commencé mercredi 1er juillet sur France 2.