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Séries True Detective Saison 3 : Les morceaux de la mémoire pour reconstruire l’enquête d’une vie

True Detective Saison 3 : Les morceaux de la mémoire pour reconstruire l’enquête d’une vie

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Le temps n’est pas un cercle sans fin dans la saison 3 de True Detective, mais un puzzle de souvenirs à reconstruire.

Au scénario, le créateur Nic Pizzolatto nous entraine dans les Ozark et plus précisément, dans la région du nord-ouest de l’Arkansas, étant donné que le plateau Ozark s’étend sur plusieurs états pour suivre un duo de flics et une enquête qui s’étale sur trois périodes temporelles, et 8 épisodes.

Wayne Hays (Mahershala Ali) est un détective de la police d’État dans l’Arkansas en 1980 qui, avec son partenaire Roland West (Stephen Dorff), se voit confier l’investigation sur la disparition de deux enfants. En 1990, l’affaire Purcell est rouverte suite à de nouvelles informations et en 2015, Hays est un homme perdant la mémoire qui évoque le passé pour un documentaire.

Qu’est-il exactement arrivé aux deux enfants Purcell ? Cette question ne hante pas à proprement parler cette saison 3 de True Detective qui est plus fasciné par l’impact de l’enquête sur l’existence de son détective principal, Wayne Hays, que sur ces deux pauvres enfants. Dès lors, le sous-titre de cette saison pourrait très bien être The Mahershala Ali show.

L’acteur oscarisé livre le portrait d’un homme légèrement obsessionnel qui se laisse consumer par cette affaire au détriment de ceux qui l’entourent – de son partenaire Roland à son épouse Amelia. Pourquoi celle-ci plus qu’une autre ? Cette question n’a pas de réponse, car Pizzolatto nous indique simplement comment la détermination d’une personne à chercher des explications peut finir par l’absorber au point de définir toute son existence.

Hays est un détective noir compétent évoluant dans une Amérique où le racisme et la pauvreté se côtoient de près et touchent du monde. Le choix est fait de ne pas laisser ces deux problématiques définir le récit, existant via la situation des personnages qui sont interrogés et des dialogues qui exposent bien mieux une réalité sociale que n’importe quel discours enragé. Il en ressort ainsi une représentation socio-économique complexe qui n’épargne personne.

Cette saison 3 de True Detective se tourne directement vers la reconstruction du passé pour comprendre le présent et comment chaque décision nous mène à une autre pour mieux définir la personne que l’on devient. Hays est présenté comme un excellent pisteur qui, vieillissant, ne peut plus retrouver son chemin tout seul. Cela ne prend pas pour autant la forme d’un jeu de piste, car les sauts temporels ne sont qu’un artifice narratif. Le récit se déroule en vérité de façon linéaire, alors même que Pizzolato utilise le procédé pour faire de la rétention d’informations.

Le scénariste contrôle de trop près le déroulement des évènements, au point d’éliminer toutes spontanéité et surprise. Dès lors qu’on arrive à une explication ou une révélation sur l’affaire Purcell, on a déjà tiré les conclusions nécessaires – car on nous a largement laissé le temps pour le faire. À l’exception de la distraction que fut la référence à la première saison, les véritables retournements de situation sont plus ou moins absents de cette saison de True Detective qui peine à donner de l’intérêt à son investigation.

Tout est tellement concentré sur Wayne Hays que l’on a le sentiment de passer à côté de tout le reste. Aussi brillant soit Mahershala Ali, c’est Stephen Dorff qui surprend – dans le meilleur sens du terme – dans la peau de Roland, un détective étonnamment attachant et qui paie le prix de l’obsession de son collègue. Il délivre une performance tout en subtilité qui joue habilement sur les forces et faiblesses de l’homme pour lequel il est aisé de développer de la sympathie et tout simplement de s’attacher à lui. Plus facile qu’avec Hays, homme rigide qui doit clairement son salut à son amour pour son épouse, Amelia (Carmen Ejogo). À l’image de Roland, cette dernière existe avant tout dans l’ombre de son mari, alors même que sa carrière professionnelle l’a, elle aussi, conduite vers l’affaire Purcell. La relation du couple est entrelacée dans cette affaire, mais c’est le point de vue de Wayne qui prime toujours.

Au final, cette saison 3 de True Detective déroule une histoire bien simpliste dissimulée derrière quelques artifices narratifs. L’histoire d’un détective (à  la retraite) souffrant de pertes de mémoire et qui cherche ainsi à reconstruire le puzzle de son existence. Il se trouve juste que celle-ci fut pendant de nombreuses années intrinsèquement liées à l’affaire Purcell. Dommage que ni l’homme ni l’investigation ne possédait la complexité nécessaire pour alimenter d’un bout à l’autre huit épisodes. La saison a ses moments brillants, mais il s’agit d’une étincelle à l’occasion dans un récit loin d’être haletant.