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Séries Unbelievable : L’incroyable histoire vraie d’un viol

Unbelievable : L’incroyable histoire vraie d’un viol

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Incroyable, le scénario de dernière minisérie Netflix l’est pour sûr. Incroyable non pas parce qu’il est magique ou fascinant, mais bien parce qu’il est inimaginable tant son propos est révoltant. Développée par Susannah Grant, Michael Chabon et Ayelet Waldman, Unbelievavble s’inspire de l’article des journalistes T. Christian Miller et Ken Armstrong, récompensé du Prix Pulitzer en 2016 revenant sur des faits réels. La série s’attaque au sujet sensible du viol et au système judiciaire américain en berne à travers la terrible traque d’un violeur en série à la fin des années 2000 au Colorado.

Le premier épisode glacial et anxiogène nous présente Marie Adler (Kaitlyn Dever), traumatisée suite à une agression sexuelle d’une extrême violence. Épuisée par des examens déshumanisants et les interrogatoires à répétition sous les regards désapprobateurs de la police qui remettent en cause son passé et son comportement, elle n’a pas d’autre choix que de revenir sur sa plainte, et commence une douloureuse descente aux enfers. Quelques années plus tard, deux enquêtrices unissent leurs forces pour mettre sous les verrous un agresseur aux pratiques similaires.

Pour elles

Oubliez Mindhunter et sa fine analyse de la psychologie des criminels, la victime est ici remise au premier plan. La réalisation minimaliste, mais soignée tente de retranscrire au plus juste le ressenti de ces femmes, du plus petit soupçon d’espoir à la terreur la plus vive. Glacial, presque documentaire quand il s’agit de l’enquête, Unbelievable mise tout sur l’impartialité et la vérité crue pour faire transparaitre toute l’horreur de cette réalité qui est la nôtre.

Unbelievable pointe du doigt le sexisme latent qui interdit aux femmes leur statut de victime, les failles d’un système judiciaire obsolète et le manque de sensibilisation général de tous. Bien que les faits se déroulent aux États-Unis il y a presque 10 ans, il serait naïf de penser qu’il en est autrement de notre côté de l’Atlantique aujourd’hui.

Parmi les victimes, on trouve des femmes de tout âge, de toute morphologie et de milieux sociaux différents : personne n’est épargné, tout le monde est concerné. Leur parcours du combattant est parfaitement retranscrit à travers celui de Marie. Son mal-être, sa solitude, le nouveau regard des hommes qui l’entourent, le jugement de ses amis, tout est minutieusement décortiqué.

On n’accuse jamais une personne victime de cambriolage d’avoir menti. Ça n’arrive pas. Mais lorsqu’il s’agit d’agression sexuelle, la situation est différente.

Un duo détonnant

Pour rendre justice à Marie et toutes ces autres femmes, les lieutenants Grace Rasmussen (Toni Collette) et Karen Duvall (Merritt Wever) tentent de recoller les pièces du puzzle. Ce duo formidable et si loin des clichés habituels du genre font la force et le charme d’Unbelievable. Au milieu du chaos, ces deux femmes repoussent les limites pour une justice qu’elles savent bancale, mais dont elles tirent le maximum.

Portées par deux actrices qui n’ont plus rien à prouver, Karen et Grace sont extrêmement touchantes et apportent un peu de chaleur à l’ensemble. Au-delà de leurs différences, elles travaillent côte à côte, s’appuient l’une sur l’autre, et naît au fil des épisodes une sorte d’admiration mutuelle.

Cette combinaison gagnante porte l’histoire même lorsqu’elle tâtonne et offre un espace à la série pour aborder d’autres problématiques bien d’aujourd’hui : le couple, la culpabilité des mères qui ont une carrière ou la place de la religion…. Mais une guerre à la fois.

Une œuvre à la hauteur de la difficulté du sujet

Aborder des sujets aussi violents et tabous comporte des risques auxquels peu osent se frotter. Unbelievable les évite presque tous et propose une série cohérente, équilibrée et marquante. La série parvient à rester captivante d’un bout à l’autre, utilisant ses baisses de régime pour traduire la frustration des personnages ou les impasses de l’enquête. Le seul bémol à ce niveau est une gestion approximative de la temporalité qui garde le spectateur dans le flou.

Unbelievable est une série de femmes, mais n’incrimine par les hommes pour autant. Elle incite plutôt à la prise de conscience, charge le système et dénonce un manque d’éducation. Les scénaristes s’autorisent même à finir sur une note d’espoir. Les couleurs vivent et le soleil radieux de cette fin de saison contraste avec le camaïeu de gris du premier épisode, et invitent à croire que la situation va s’améliorer même si la route est encore longue.

Menée par des interprètes convaincantes et brodées de dialogues au cordeau, Unbelievable est une série au sujet difficile, mais impactante. Elle réussit son pari et s’installe comme un immanquable du catalogue Netflix.