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Cult Character : Bernard Black (Black Books)

Bernard Black - Cult Character : Bernard Black (Black Books)

Alcoolique de profession et libraire à ses heures perdues, ou l’inverse, lui-même semble ignorer la frontière, Bernard Black est écrit et interprété par Dylan Moran. Malgré une gestion visiblement très confuse, il dirige la petite boutique au nom doublement évocateur, Black Books, et ses relations sociales régulières se limitent à son assistant, Manny, victime semi-consentante, et à sa meilleure amie, Fran.

Très vite, la ressemblance avec un gosse turbulent est visible : il est celui qui va sadiquement détruire le château de sable du petit gros, tirer les couettes de la fille dont il est amoureux et mettre du sable dans sa culotte. C’est l’assistant du libraire qui voit ses constructions s’écrouler au simple contact visuel de son patron, ce dernier aimant presque autant le tyranniser que vider des bouteilles d’alcools par cagette de douze. En plus d’être un garçon au caractère très coopératif, Manny doit jouer souvent jouer les figures paternelles, dans l’intimité ou dans le travail, pour Bernard qui se fiche d’à peu près tout ce qui peut ressembler à une responsabilité. Équipé d’environ tous les vices, voire un peu plus, il met sans cesse les nerfs de son entourage à rude épreuve, son goût quasiment revendiqué pour le chaos, contenu tant bien que mal, explosant violemment au visage de quiconque l’approche d’un peu trop près.

Ce militant du foutoir n’est pas à sa place dans un environnement astiqué. Ranger son domicile comme tente parfois dangereusement de le faire Manny, c’est provoquer tout son être à une vengeance terrible, presque trop cruelle pour être filmée. Les codes sont simplement inversés, Bernard Black ne fonctionne pas dans l’excès, il est simplement l’inverse de toute personne socialement constitué après des années de pratique régulière. Les premiers pas tremblotants parfois esquissés vers une potentielle petite amie ou un couple d’amis élégants sous tout rapport ne peuvent se solder que par un échec pour les malheureux, une disparition pure et simple de la série ou une défécation dans un salon, tous les moyens sont bons.

Comme tout bon dictateur amateur, Bernard ne cesse de tenter une appropriation de l’espace qu’il traverse. Le lieu de sa boutique étant de toute façon acquis, il n’a pas besoin de forcer le trait et gère tranquillement une tyrannie quotidienne d’où jaillissent les effets comiques. Seulement, une fois sorti de cet endroit chéri, il n’a pas la facilité d’adaptation de Manny ou la timidité de Fran. Il doit donc faire le plus de bruit possible, s’agiter, mettre à terre les réticents. C’est par l’alcool que ça passe le plus souvent, maigre alibi pour un hobby visiblement jubilatoire. Volant tout une atmosphère après deux ou trois verres et un endroit tout entier après une bouteille, Bernard se construit systématiquement maître des lieux. Savant fou dans un manoir, parieur jusqu’au-boutiste à l’hippodrome ou joueur de piano faussement génial alors qu’un autre type en frotte les cordes depuis l’intérieur, il ne fait pas qu’intégrer un espace, il le remplit à ras bord.

Jamais attachant, Bernard reste l’un des héros de série télé les plus dérangeants, où pas une qualité ne vient clairement corrompre cette boule de haine. Pire encore, il ne s’autorise pas seulement à détester son entourage, c’est un client qui peut faire les frais de son courroux légendaire pour avoir parfois l’imprudence d’avoir envie d’acheter un livre. Crachant, littéralement ou non, sur tout ce qui peut ressembler à une attitude morale, le personnage reste intègre à sa façon, modèle ses propres règles autant que celles de sa librairie ou de sa série télé. Militant du chaos ou clown burlesque, il reste un éternel symbole du mouvement punk. Johnny Rotten en plus désagréable.