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Hill Street Blues : La série qui a créé le modèle pour les séries modernes à 40 ans

Hills Street Blues Capitaine Furillo - Hill Street Blues : La série qui a créé le modèle pour les séries modernes à 40 ans

C’est peu dire que d’affirmer que les séries ne seraient pas devenues ce qu’elles sont aujourd’hui sans The Sopranos, mais d’autres avant elle ont justement pavé le chemin pour qu’elle puisse exister. Une en particulier a provoqué une véritable révolution en son temps, il y a 40 ans de cela.

Connue sous le titre Capitaine Furillo en France, Hill Street Blues est la série qui a été pensée pour ne pas être comme les autres et qui finit par être tellement imitée qu’il est devenu difficile de pleinement saisir pourquoi son existence même était une anomalie.

L’histoire est assez simple. Dans une grande ville américaine, on suit la vie agitée d’un commissariat situé en plein cœur d’Hill Street, une zone peuplée par les gangs et où le melting pot est à son maximum. Le capitaine Frank Furillo (Daniel J. Travanti) doit continuellement négocier avec les forces en place pour maintenir la paix, tandis que ses officiers et détectives s’occupent de gérer aussi bien les affaires de vols à la tire, que les désordres domestiques, les arnaqueurs et les meurtriers. Chaque épisode couvrait une journée à la fois, que l’intrigue soit bouclée ou non, et débutait toujours de la même manière avec le briefing dispensé par le Sergent Phil Esterhaus (Michael Conrad) qui terminait systématiquement ses présentations en encourageant ses officiers à être prudents durant leurs patrouilles.

Hill Street Blues suivait donc une formule, mais elle n’était pas très contraignante. Certaines histoires étaient ainsi sans conclusion, d’autres s’étalaient sur plusieurs épisodes et d’autres avaient le droit à un rapide développement. À une époque où il était encore considéré que demander aux spectateurs de se souvenir de ce qu’il se passait dans une série d’une semaine à l’autre était malavisé, tout ceci était très ambitieux — tout comme le nombre impressionnant de personnages au générique, plus d’une dizaine de réguliers en saison 1.

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Les audiences de la première saison étaient catastrophiques, mais avec un record de 21 nominations aux Emmy Awards (elle en gagna 6 cette première année et cumula 96 victoires en 7 saisons), NBC détenait clairement quelque chose de spécial. C’est exactement ce que voulait Fred Silverman — le président du network à l’époque — quand il avait suggéré le développement d’une série au format d’une heure qui serait un croisement entre la comédie Barney Miller et l’anthologie Police Story. Silverman fut renvoyé avant de pouvoir profiter de la célébration de Hill Street Blues. Lui qui avait apporté tant de gloire à CBS et ABC durant les années 70, il avait échoué à faire de même sur NBC, mais il eut le temps de commander une saison 2 de la série policière avant de plier bagage. Son remplaçant n’était autre que Grant Tinker, le producteur de The Mary Tyler Moore Show, Bob Newhart, Lou Grant et bien entendu Hill Street Blues. Quand Silverman avait chargé Brandon Tartikoff de trouver quelqu’un pour réaliser son idée, il s’était justement tourné Tinker et cela le mena à rencontrer Steven Bochco et Michael Kozoll. Les scénaristes ne désiraient pas écrire une série policière de plus, mais quand on leur donna la liberté de faire ce qu’ils voulaient sans interférence du network, ils saisirent l’occasion et créèrent le show que personne n’aurait accepté de diffuser auparavant, un qui leur offrait l’opportunité d’explorer un format mélangeant plusieurs storylines par épisode.

En plus d’une structure narrative innovante et d’un large casting qui lui permettait de se distinguer du reste, Hill Street Blues était unique sur un plan visuel avec son style emprunté au documentaire qui rendait le récit aussi chaotique qu’immersif. Être différent n’est jamais facile à la télévision américaine. Bochco et Kozoll durent réviser leur copie et accepter d’avoir au moins une intrigue complète par épisode pour pouvoir obtenir une saison 2. La demande n’était pas irraisonnable, car ils avaient réalisé la difficulté de maintenir leur approche sur la durée et un peu plus de rigidité ne pouvait pas faire de mal. Cela les aida également à mieux jongler avec leur savant mélange de genres, puisque leur show n’était pas qu’une simple série policière, elle proposait une critique sociale, économique et politique qui se contenait à une touche de soap opéra, d’occasionnels moments de comédie ou de pur drame.

Encore une fois, tout ceci est relativement standard aujourd’hui, contrairement à 1981. Ce qui était assimilé à une quête de réalisme à l’époque apparait à présent très léger, tout comme le fait que le casting principal comptait plusieurs acteurs afro-américains est dorénavant anodin. Pourtant, Hill Street Blues brisa des tabous, offrit une représentation unique de l’Amérique et apporta une pointe d’authenticité qui était presque totalement étrangère dans les séries.

En cherchant à contourner les règles établies, Steven Bochco et Michael Kozoll en ont établi de nouvelles qui allaient devoir à leur tour être régulièrement remises en question par la suite. Quarante ans plus tard, la série reste malgré tout moderne sur bien des points. Certes, elle a pris quelques rides impossibles à ignorer, mais les sujets qu’elle abordait sont encore tristement trop souvent d’actualité. Même si Furillo était l’archétype du flic trop vertueux pour son propre bien,  pouvait critiquer la police comme cela ne se fait pas encore assez à présent, de ses mauvais éléments à ses politiques douteuses.

Malheureusement, il est difficile de la trouver en France aujourd’hui. Son âge explique cela aisément et fait même d’elle le genre de série que l’on cherche plus à voir par curiosité qu’autre chose. Avoir changé la télévision il y a quatre décennies justifie amplement cela, mais il ne faudrait pas diminuer le fait qu’elle est toujours une très bonne série malgré tout.

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