Patrick Melrose est un aristocrate en proie à ses traumatismes d’enfance et ses addictions. Il est aussi le personnage phare des romans à tenant autobiographique d’Edward St Aubyn portée présentement à l’écran par Sky et Showtime dans une mini-série en 5 épisodes. En gros, Patrick est la version fictionnelle de l’auteur.
Issu d’une famille riche dysfonctionnelle, Patrick Melrose mène une vie décousue alimentée par toutes formes de drogues qui l’aide finalement à faire taire ses démons intérieurs. Il ne peut étouffer ces derniers lorsqu’il reçoit un coup de téléphone qui lui annonce que son père est mort.
C’est ainsi que s’amorce pour Patrick — interprété par Benedict Cumberbatch — un long processus de guérison pour trouver un équilibre qui lui a été refusé. Cependant, si Patrick finit par être en quête de rédemption, la route est longue, sinueuse et semée d’embûches.
Scénarisée d’un bout à l’autre par David Nicholls, Patrick Melrose adapte donc à chaque épisode un livre qui nous relate un chapitre spécifique de la vie de son protagoniste. Non linéaire, le récit nous entraine à New York dans les années 80, en France dans les années 60 ou encore en Grande-Bretagne au début des années 1990 et 2000.
En plus d’un changement temporel, chaque épisode de cette série réalisée par Edward Berger se focalise souvent sur un évènement ou un lieu précis pour mieux ancrer son récit dans un moment particulier de la vie de Patrick.
L’ensemble se développe en explicitant les démons qui habitent l’aristocrate sans rien passer et nous aider à mieux comprendre son penchant naturel pour la destruction. La série s’affirme dès son premier épisode comme une œuvre sur l’addiction qui aborde alors frontalement son sujet, mélangeant humour noir et troubles psychologiques pour dépeindre la descente aux enfers de Patrick, sa soif de drogues ou d’alcool et les efforts fournis pour survivre. La série reflète une difficile réalité qui prend aux tripes de par son portrait émotionnel à vif. Il est naturellement douloureux de regarder le personnage se détruire ou affronter ce qui le hante et le consume de l’intérieur.
Le sujet aurait pu pousser à quelques représentations graphiques, mais la production mise sur une mise en scène subtile et ses acteurs pour véhiculer la dureté ou l’absurdité d’un moment. Avec un protagoniste amateur de sarcasme, Patrick Melrose possède un second degré bienvenu pour aider à assister à tout ce qui nous est exposé et éviter de se laisser emporter par un courant de noirceur malgré la rage de son protagoniste qui peut à l’occasion prendre le dessus.
Bien évidemment, Patrick évolue dans un milieu privilégié où l’on croise des personnages aussi détestables que comiques (le portrait de la princesse Margaret vaut le détour), mais également des gens attachants, d’autres âmes perdues comme Patrick. Petit à petit, le récit qui est déroulé donne à la situation sociale de Patrick une valeur notable, signifiant indirectement la place occupée par l’argent dans ce cycle de destruction familiale qui ne cesse de se répéter.
Au fond, Patrick Melrose est explicite sur l’origine des problèmes de son personnage et sur la manière dont un fléau passe d’une génération à une autre, entretenu par le silence, l’entourage, l’argent et la peur.
De l’œuvre de St. Aubyn résultent 5 épisodes qui sont comme un tourbillon émotionnel qui se révèle à la fois excitant et douloureux. Patrick Melrose s’impose comme une œuvre poignante et troublante qui traite avec intelligence et réalisme l’addiction et les traumas familiaux.
Patrick Melrose est diffusée sur Canal + à partir de ce lundi 25 mars 2019 à 21h05 et sera disponible en DVD dès le 2 mai.
