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Séries Self Made : La vie romantisée de Madam C.J. Walker (sur Netflix)

Self Made : La vie romantisée de Madam C.J. Walker (sur Netflix)

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Née Sarah Breedlove, Madam C.J. Walker a vécu une vie qui possède tous les éléments pour donner le jour à une série digne de ce nom. Fille d’anciens esclaves, elle est orpheline a 10 ans, et doit travailler comme domestique. De ses débuts difficiles à la première femme afro-américaine millionnaire, ayant dû dépasser les préjugés racistes, le sexisme et plus encore, il y a bien des choses qui se sont passés, toute une histoire à raconter.

Librement inspirée par la biographie On Her Own Ground écrite par A’Lelia Bundles (descendante de Sarah), Self Made : D’après la vie de Madam C.J. Walker — disponible sur Netflix — cherche à sa manière à nous relater cette incroyable histoire. À sa manière, car il devient évident très tôt au cours des 4 épisodes qui composent cette minisérie que le récit est adapté pour délivrer une version romantisée de l’histoire.

Plus précisément, Self Made opte pour une représentation embellie et surtout simplifiée de son héroïne au détriment d’un récit plus complexe. Le portrait fait de Sarah Walker n’est pas totalement idéalisé, mais la place le plus souvent dans le bon rôle et survole toutes ses problématiques sans exception.  Pourtant, elle a de quoi fasciner, qualités et défauts compris, et Octavia Spencer une actrice plus que capable de retranscrire toute la complexité de cette femme qui a su braver bien des obstacles pour construire son empire.

Si Self Made multiplie les épreuves (véridiques ou non) à surmonter –  racisme, sexisme, colorisme, adultère, et j’en passe – tout est mis en scène avec un manichéisme gênant. Réécrivant  à sa manière l’histoire pour créer plus de tensions, Self Made s’articule en partie d’autour de la rivalité entre Madam C.J. Walker et Addie Munroe (Carmen Ejogo), inspirée par la véritable Addie Malone, dont le comportement vindicatif est caricatural au possible. Addie doit se contenter de plus ou moins tourner autour de sa concurrente, presque dépouillée de tout agenda personnel au-delà de son envie de battre sa rivale. Le succès (et les déboires) de sa propre entreprise est plus ou moins invisible, elle n’existe que pour se trouver sur la route de Sarah..

Pour une série célébrant la femme noire dans toute sa splendeur à travers l’improbable histoire d’une « pionnière » du soin des cheveux noirs au début du siècle en Amérique, il est un peu triste de les voir traiter celle qui est placée comme une adversaire avec un tel dédain. Cela dessert le propos qui en ressort affaiblit. L’intrigue en prend également un coup, passant à côté de belles opportunités de nous illustrer l’esprit d’entreprise, le monde impitoyable des affaires de l’époque et le développement de toute une industrie grâce à ses figures centrales.

De manière générale, Self Made souffre d’une vision étroite, ne parvenant alors pas à décemment donner corps à l’univers de Madam C.J. Walker et de ceux qui l’entourent. Elle s’encombre de petits effets créatifs franchement inutiles avec le match de box ou le numéro musical ; elle invente plus que de raison comme la romance lesbienne de Lelia, la fille de Walker (Tiffany Haddish) ; elle étire certains problèmes à l’image de l’intrigue avec l’égo meurtri de C.J. (Blair Underwood), le mari de Sarah ; elle  survole tout ce qui compte dans le développement de l’entreprise et la notion d’héritage pour au final opter pour des conclusions évidentes et peu engageantes.

L’équipe créative de Self Made ne rend ainsi pas justice à son sujet et donne le jour à une mini-série superficielle et cliché. Un certain nombre de choix créatifs est donc regrettable, surtout qu’il y avait clairement, dans la vie de Sarah Walker, tous les éléments pour une minisérie passionnante.

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