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Séries Que vaut Irresponsable, la nouvelle comédie française d’OCS ?

Que vaut Irresponsable, la nouvelle comédie française d’OCS ?

irresponsable serie francaise ocs - Que vaut Irresponsable, la nouvelle comédie française d’OCS ?

La télévision française donne régulièrement de beaux signes de vie ces derniers temps, à travers des séries comme Dix pour cent, Baron Noir ou Le Bureau des Légendes. L’offre se diversifie et les moyens de production s’étoffent, s’émancipant alors des mastodontes que sont France Télévisions et Canal+. On peut maintenant compter sur d’autres canaux pour offrir du contenu original et prometteur, notamment avec OCS qui nous a proposé Lazy Company, Templeton et désormais Irresponsable.

Le pitch de départ est aussi incongru que résolument contemporain : Julien (Sébastien Chassagne), trentenaire perdant boulot et appartement, retourne chez sa mère et découvre qu’il est père de Jack, 15 ans, fruit caché de son amour de jeunesse, Marie, professeure dans un lycée. C’est d’ailleurs en postulant pour un poste de pion dans ce même établissement qu’il apprend sa paternité. De ce postulat de départ un peu éculé, la série d’OCS prend le parti d’en faire une peinture comique d’une génération perdue et détachée de la réalité.

Chronique existentielle

Comme son nom l’indique, Irresponsable est une chronique de la loose à partir d’un personnage synthétisant tout un pan de la société actuelle. Même s’il n’est pas défini que par cela, Julien est l’archétype d’une génération trustant les bancs de Pôle Emploi, errant sans but dans leurs anciennes chambres d’adolescents. Ce côté régressif colle parfaitement à l’actualité, surtout quand il s’agit de montrer que le personnage n’est pas prêt à prendre ses responsabilités, même quand l’arrivée d’un fils caché et de sa mère bouleverse son quotidien inepte.

Julien a l’âge mental de son fils, ce qui les rapproche en premier lieu – ils fument de l’herbe, font la fête et agissent sans penser aux conséquences – mais les éloigne également. La série utilise les poncifs de cette situation pour construire un personnage jouant plus sur le terrain du pote que devenant une figure de père, le décalage entre attente et réalité du comportement provoquant alors la comédie. Julien revit son adolescence par son fils mais ne parvient pas à en tirer les effets et les responsabilités qui lui incombent désormais.

Si l’intrigue de la saison donne l’impression de faire du sur-place pendant les dix épisodes qui la composent, c’est principalement parce qu’elle est une amorce, une introduction à l’évolution des personnages. Julien ne grandit pas d’un jour à l’autre parce que l’événement chamboule sa vie. Il est perdu, tâtonne mais essaie, sans nier sa part d’égoïsme, de fainéantise. Des signes de maturité apparaissent vers la fin de saison, mais cela ne le transforme pas radicalement en travailleur acharné et père modèle, loin de là.

On s’était mis d’accord ! Le dernier week-end du mois, c’est celui où tu fais des efforts !

Comique de situation simple, mais efficace

Irresponsable réussit à écrire la vie des jeunes avec une acuité exemplaire mais n’oublie pas de faire rire et cela, assez régulièrement. L’humour de la série repose sur une banalité étrangement fascinante et fort à-propos. Le moindre petit écart de langage, accident de la vie, accroc se transforme en gag. Une portière de voiture qui ne s’ouvre pas, une mère qui surprend son fils en train de se masturber, un mot dit à la place d’un autre … La série joue sur un comique de situation simple mais d’une efficacité redoutable parce qu’il sort de partout. Les blagues nous rappellent souvent à des situations que l’on a nous-même vécu, rendant l’ensemble encore plus efficient.

Les relations qui se construisent sous nos yeux participent également à bâtir l’humour et la solidité de la série grâce à des petites saynètes développant les personnages. Le rire surgit de l’irresponsabilité du père envers le fils, envers sa propre mère ou son ancien amour mais aussi la société l’entourant. Si l’intrigue autour du trafic de drogue est peut-être la moins inspirée parce que ne sortant pas des rails, l’histoire de ces personnages qui réapprennent à vivre ensemble porte magnifiquement la saison. Au-delà des gags mais sans jamais les diminuer, la construction des liens entre Julien et sa mère ou Julien et Jacques se révèle étonnement touchante parce qu’écrite et jouée avec sincérité et simplicité.

Irresponsable serait une série sur le syndrome de Peter Pan, nous exposant un adulte incapable de comprendre la situation économique, sociale et émotionnelle dans laquelle il se trouve. La pertinence du propos transparaît dès que Marie le confronte à son incapacité à prendre une quelconque décision mature mais également quand sa mère le pousse à chercher du travail et qu’il reste avachi dans sa hébétude.

Irresponsable, comédie contemporaine

Dans la France des années 2010 qui a voulu d’un président « normal », nous avons une série montrant des gens « normaux », au comportement « normal » face au contexte actuel. Un portrait à l’instant T de la société et l’individu qui la compose. Irresponsable nous fait rire tout en construisant une représentation de thèmes contemporains à travers la gaucherie émotive d’un trentaine looser. Julien, c’est plus ou moins nous dans une situation que l’on peut tous vivre dans un jour prochain. Si la perspective est effrayante, on envie son sens de la vie.

Au final, si Irresponsable peut passer pour une petite comédie, elle se fait le pendant français des dramédies américaines telles que You’re The Worst, dans sa capacité similaire à nous plier de rire tout en se faisant écho d’une génération errante, au questionnement contemporain.

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